AVEC L’ARRIVÉE de l’hiver austral, les cas de virus A/H1N1 devraient se concentrer dans l’hémisphère sud, exposant les pays pauvres au risque pandémique. C’est pourquoi le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon et la directrice générale de l’OMS Margaret Chan ont décidé de convoquer aujourd’hui à Genève « les responsables de toutes les sociétés fabricant des vaccins contre la grippe ». L’objectif de la réunion est de « s’assurer que les pays en développement disposeront d’un accès équitable à ce vaccin s’il est disponible ». Celui-ci en est au premier stade de son élaboration, après le séquençage du virus par les chercheurs des CDC (Centres de contrôle et de prévention des maladies américains). Une fois les souches virales créées, la culture cellulaire devrait être lancée, qui permettrait de mettre un vaccin sur le marché en seize semaines, estime un porte-parole de Novartis, contre les six à neuf mois nécessaires pour développer et produire un vaccin par la méthode classique, avec des centaines de milliers d’ufs de poule.
Une question subsidiaire doit en outre être réglée : faut-il intégrer la souche nord-américaine du virus dans le vaccin de la grippe saisonnière, ou réaliser un vaccin spécifique contre la pandémie ? La téléconférence organisée la semaine dernière par l’OMS a engagé « un processus méticuleux et difficile » sur le sujet. « La capacité mondiale de production est encore limitée et tous les investissements dans ce domaine sont nécessaires », souligne Albert Garcia, porte-parole de Sanofi-Pasteur, le leader mondial des vaccins. « Arrêter en France la fabrication du vaccin contre la saisonnière pour celui contre la grippe A constitue une vraie question de santé publique, ajoute Christopher Viehbacher, directeur général de Sanofi-Aventis, qui dispose de deux usines aux États-Unis et une en France pour réaliser la production. À l’OMS de fixer le cap. »
Recommandations aux voyageurs.
À l’occasion du 1er colloque santé et voyage organisé à l’hôpital Tenon, le Pr Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses et tropicales, est revenu sur les recommandations aux voyageurs qui séjournent dans les trois pays actuellement classés à risque par la cellule interministérielle de crise (Mexique, États-Unis et Canada) : sur place, limiter la fréquentation des lieux de rassemblement non aérés, veiller à un lavage régulier des mains et à l’aération des pièces, accorder une attention particulière aux enfants et aux personnes âgées ou fragiles. Au retour, pendant une période de 7 jours, éviter les contacts rapprochés avec les enfants de moins d’un an et, en cas de fièvre ou de symptômes grippaux, prendre contact avec le médecin traitant ou le centre 15.
Alors que le Pr Antoine Flahaut (École des hautes études en santé publique) estime que le pic en France se fera sentir « après l’été », pouvant toucher « 35 % de la population » et entraîner 30 000 décès, contre 6000, en moyenne, avec la grippe saisonnière, le Pr Pialoux a listé toutes les inconnues qui subsistent aujourd’hui : « l’origine de cette émergence de H1N1, l’ampleur de la deuxième vague, le temps nécessaire à l’élimination du virus de l’hôte porcin, la pathogénicité à venir de ce A/H1N1, ou des suivants, la sensibilité à venir au Tamiflu de ce H1N1, la poursuite du réassortiment H1N1 ». Face à autant d’incertitudes, la question de savoir si l’humanité est menacée reste, estime l’infectiologue, en suspens, avec toutes les questions connexes sur les diverses mobilisations internationale, médiatique, politique et médicale.
Pragmatique, l’OMS a décidé dans l’immédiat de réduire de neuf à onze jours son Assemblée mondiale qui s’est ouverte hier, de manière à « permettre aux ministres et responsables de la santé de s’absenter moins longtemps de leur pays alors qu’ils doivent coordonner les efforts contre la grippe ».
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