Pas de quoi pavoiser. En dix ans (2013-2023), la forte hausse du nombre de patients aux urgences s’est accompagnée d’un allongement des durées de passages (entre l’enregistrement administratif et la sortie du service) révèle la Drees, direction statistique des ministères sociaux, dans une enquête publiée ce mercredi 19 mars. Ce baromètre, réalisé avec les professionnels des urgences*, fournit une bonne photographie nationale des urgences sur 24 heures « un jour moyen en semaine » (dans les 719 services d’urgences en France, en l’occurrence le 13 juin 2023), à dix ans d’intervalle de la précédente édition.
Principal enseignement : les durées des passages aux urgences ont bondi sur la décennie, avec une progression de 45 minutes de la durée médiane des séjours. Ainsi, la moitié des patients passés par un service d'urgences en 2023 y ont séjourné plus de trois heures, contre seulement 2 heures et 15 minutes en 2013.
Si la durée passée aux urgences varie fortement selon les parcours des patients, « la hausse est générale », quelle que soit la modalité d’entrée. Sans surprise, ce sont les 5 % de patients passés par une unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD) qui subissent les temps de passage les plus élevés. La durée médiane frôle les 15 heures (en l’absence d’hospitalisation), soit deux heures et 20 minutes de plus qu’en 2013.
Pour les 80 % de patients rentrés à domicile à l’issue des urgences, la durée moyenne était de 2 heures 30 aux urgences, soit 40 minutes de plus qu’en 2013.
Et pour les patients qui sont allés directement des urgences dans un autre service, la durée médiane a carrément explosé, atteignant 5 heures 20 minutes, soit une heure et 25 minutes de plus sur la période.

La taille du service influe sur la durée de passage. Ainsi la moitié des patients passent moins de deux heures dans les points d’accueil qui reçoivent 40 patients ou moins en 24 heures, contre près de quatre heures dans ceux avec plus de 120 passages. Les personnes âgées de plus de 75 ans sont particulièrement concernées par ces passages longs : 36 % d'entre elles y sont restées plus de 8 heures, contre 15 % pour la population générale.
Les urgences faute d’accès aux soins de ville dans un cas sur cinq
L'étude révèle par ailleurs une nette augmentation des personnes venant aux urgences… faute de rendez-vous ailleurs (médecin traitant absent, impossibilité de trouver un rendez-vous médical y compris en cas de besoin d’un examen rapide) : 21 % des patients ont mentionné ces difficultés pour expliquer leur venue à la porte des hôpitaux en 2023, contre 14 % en 2013.
La régulation porte néanmoins ses fruits. La moitié des répondants indiquent avoir été adressés par un médecin ou transportés par un véhicule de secours. Malgré tout, dans l’autre moitié des cas, les patients continuent de venir de leur propre initiative ou conseillés par un proche (contre 59 % dix ans plus tôt).
La traumatologie (blessures, plaies, brûlures, etc.) concerne un tiers des passages en 2023, la gastro-entérologie et les pathologies cardiocirculatoires, chacun un dixième des séjours. Les enfants, jusqu’à 5 ans, se présentent avec des pathologies variées (fièvre, pathologies gastro-entérologiques, respiratoires et traumatiques) tandis qu’entre 5 et 14 ans, les lésions traumatologiques dominent. À partir de 75 ans, les personnes ont recours aux urgences pour des motifs traumatologiques dans 25 % des cas et pour des problèmes cardiocirculatoires, dans 16 % des cas.
Le graphique ci-dessous détaille l’issue de la prise en charge aux urgences avec 15 % seulement des patients réorientés finalement vers une hospitalisation dans un autre service (dont 8 % en médecine). L'hospitalisation à la sortie d’urgences a baissé à la fois « en nombre et en proportion de patients », note la Drees.

Cette baisse des hospitalisations à l’issue des urgences s’observe à tous les âges, dans tous les types d’établissement et quelle que soit la catégorie de diagnostic. Parmi les explications avancées, l’évolution des pratiques médicales mais aussi la moindre disponibilité de lits d’hospitalisation complète – dont le nombre a décru de 11 % en dix ans (soit 43 000 lits en moins).
En partenariat avec la Société française de médecine d’urgence (SFMU) et le Groupe francophone de réanimation et d’urgences pédiatriques (GFRUP), et en collaboration avec SUdF, l’Amuf, la Fedoru et le SNUHP. L’enquête Urgences 2023 a été menée auprès des 58 500 patients s’étant présentés dans les 719 points d’accueil des urgences de France. Elle concerne tous les points d’accueil des urgences générales et pédiatriques mais pas les urgences spécialisées (SOS mains, urgences dentaires, psychiatriques, ophtalmologiques ou gynécologiques, etc.). Cette enquête a été réalisée le mardi 13 juin 2023, de 8 heures le matin au lendemain à 8 heures.
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