C’est « tout frais, tout frais », et le Pr Hatem Kallel, premier président de la CME du futur CHU de Guyane, en est fort satisfait. La parution le 18 mai d’un décret au Journal officiel concrétise la création du centre hospitalier régional de Guyane (CHRG), prémices du futur CHU attendu depuis près de dix ans. Il s’agit de l’avant-dernière étape d’un long processus administratif et juridique, qui doit aboutir à l’avènement du CHU guyanais, après la signature d’une convention avec la toute jeune UFR santé de l’université de Guyane, prévue ce mois de juin.
En tant que patron de la première CME du futur CHU, le Pr Kallel est aux manettes d’un complexe projet médical dont il a présenté les contours au récent congrès parisien SantExpo. Type de pathologies et de soins, topographie, climat, caractéristiques socio-économiques de la population : tout ou presque est exceptionnel dans cette vaste région d'outre-mer, située à 7 000 km de l’Europe sur la côte nord-est de l'Amérique du Sud et couverte en son cœur par la forêt tropicale.
Le CHU consistera en pratique à mettre en réseau et à renforcer les structures de santé guyanaises publiques existantes (la médecine libérale étant marginale), soit 13 centres délocalisés de prévention et de soins (CDPS), trois hôpitaux de proximité (Saint-Georges, Maripasoula et Grand-Santi) et trois hôpitaux publics côtiers (Cayenne, Saint-Laurent-du-Maroni et Kourou). « Nous avons entre les mains un bébé CHU prometteur, né dans la douleur, plaisante à moitié le médecin intensiviste-réanimateur. C’est un début pour façonner un hôpital universitaire sur les fondements d’une empreinte guyanaise, le tout à la sauce guyanaise. »
Généralistes en vacation
La promesse du nouveau CHU est de déployer sur le sol guyanais, sous la houlette d’une gouvernance unifiée, le schéma de gradation des soins existant en métropole et surtout d’améliorer l’accès aux soins dans les communes les plus isolées. En l’état, l’offre sanitaire est fortement concentrée sur le littoral, 400 km de côtes où vit la majorité de la population, soit 250 000 personnes. « Mais 50 000 personnes habitent aussi dans les terres, de part et d’autre des fleuves Maroni, à l'ouest, qui marque la frontière avec le Suriname, et l'Oyapock, à l'est, voisin du Brésil. Eux aussi ont le droit d’être soignés à proximité de leur lieu d’habitation. Car une demi-journée en pirogue, c’est un reste à charge caché dans un porte-monnaie déjà peu fourni », argumente le Dr Cyril Rousseau, médecin en santé publique et directeur des CDPS.
Une demi-journée en pirogue, c’est un reste à charge caché dans un porte-monnaie déjà peu fourni
Dr Cyril Rousseau, directeur des CDPS
Actuellement, ces centres de santé tournent avec une infirmière et, au mieux, deux médecins, parfois à mi-temps. Le Dr Rousseau mise sur le CHU pour « apporter » 25 généralistes en vacation vers les plus petits sites, desservis uniquement par les fleuves ou par voie aérienne. À la fin de l’année, l’hôpital va engager les démarches afin d’obtenir dans les cinq ans un avion pour le transport de personnels, de marchandises et de patients.
Avec le CHU va se poursuivre « l’aventure de la connexion satellitaire en Guyane, terre où le moindre projet qui prend un mois ailleurs prend un an ici », sourit le médecin. La communauté médicale espère développer rapidement, avec les nouveaux moyens alloués au futur CHU, la télémédecine et la télé-expertise. L’unification de la gouvernance devrait permettre aussi de mieux gérer les recrutements médicaux et de mutualiser certaines ressources matérielles.
Même si le rayonnement qui accompagne l’avènement d’une nouvelle structure hospitalo-universitaire peut laisser espérer à terme une attractivité améliorée pour la médecine guyanaise, les acteurs locaux se montrent pragmatiques. C’est pourquoi la formation de nouveaux profils soignants (infirmières de coordination, infirmières en pratique avancée) et de médiateurs en santé non soignants, recrutés dans les villages où ils vivent, est à l’étude.
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