Mardi 3 septembre 2024, la chambre criminelle de la plus haute juridiction judiciaire française a refusé d’admettre des pourvois de plusieurs associations et particuliers victimes de l’amiante contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris de février 2023. Cela entérine définitivement le non-lieu prononcé en juillet 2019. Cinq anciens responsables ou dirigeants, ainsi que la société, avaient été mis en examen pour homicides et blessures involontaires, tandis que six membres du groupe et quatre anciens inspecteurs du travail avaient été placés sous le statut intermédiaire de témoin assisté.
Eternit est l'un des plus anciens dossiers d'amiante : premier producteur français d’amiante-ciment jusqu’à son interdiction en 1997, il a fait l’objet d'une ouverture d'information judiciaire dès octobre 1996, lorsque les premières plaintes d'anciens salariés ont émergé.
Pas de responsables selon un rapport d’expertise
En 2012, deux actionnaires de l’entreprise écopaient de 16 ans de prison à la suite d’un procès impliquant 6 000 parties civiles. En Belgique, fin 2023, le tribunal de première instance de Bruxelles avait reconnu la faute intentionnelle d’Eternit dans un procès intenté par Eric Jonckheere, le président de l’association belge des victimes de l’amiante.
En France, la justification du non-lieu de 2019 par les juges d’instruction est la suivante : d’après une expertise judiciaire de février 2017, il serait impossible de déduire avec précision le moment de l'exposition des salariés à cette fibre cancérogène et celui de leur contamination, et par conséquent d'établir les responsabilités pénales des dirigeants. « Ça confirme l'injustice qu'on connaît depuis 28 ans, il n'y aura pas de procès de l'amiante en France car il n'y a pas de responsable », s'est désolé Jacques Faugeron, président de l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva), auprès de l'AFP.
Le président de l’Andeva rappelle que l’on compte « des victimes de plus en plus nombreuses et de plus en plus atteintes de maladies graves, des cancers bronchopulmonaires et des mésothéliomes ». En 2012, les autorités sanitaires avaient estimé que d'ici à 2025 l'amiante pourrait causer 3 000 décès chaque année par des cancers de la plèvre ou des cancers bronchopulmonaires (ce dernier apparaît 15 à 20 ans après l’exposition). En 2014, le Haut conseil de la santé publique estimait le nombre de décès par cancer du poumon entre 50 000 et 75 000 en 2025, auxquels s’ajoutent les 18 000 à 25 000 décès par mésothéliome. Des chiffres sous estimés alors que l’amiante cause aussi des cancers du larynx ou de l’ovaire.
A.D. avec AFP
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