Robert F. Kennedy Jr persiste et signe. Le secrétaire à la Santé des États-Unis, antivax notoire, a pris récemment plusieurs décisions allant à l’encontre de la vaccination. La dernière en date est d’avoir remplacé tout un comité consultatif d’experts, abruptement renvoyé le 9 juin, par des personnalités parfois très contestables, dont un biochimiste coqueluche des antivax.
Le 27 mai déjà, il avait annoncé le retrait du vaccin contre le Covid du calendrier de vaccination recommandé par les CDC (centres de contrôle et de prévention des maladies) pour les enfants âgés d’au moins 6 mois et pour les femmes enceintes en bonne santé. Une mesure importante, prise en court-circuitant tout le réseau de décision traditionnelle.
À tel point que le lendemain, les CDC revenaient en partie sur la mesure concernant les enfants. « Au lieu de recommander la vaccination comme auparavant, les CDC recommandent désormais une “prise de décision clinique partagée” avec les parents et les médecins si les parents souhaitent la vaccination, explique au Quotidien Marie-Louise Landry, directrice du laboratoire de virologie à l’université de Yale (Connecticut). L'absence de recommandation de santé publique jette un doute sur la valeur de la vaccination des enfants et fait peser la charge sur les parents et le médecin. Elle peut également entraîner la perte de la couverture d'assurance pour les vaccins. »
Des inquiétudes sur l’impartialité du nouveau groupe d’experts
Or la vaccination des femmes enceintes protège les nourrissons jusqu'à leurs 6 mois, sachant que cette tranche d’âge présente un risque d'hospitalisation équivalent à celui des adultes âgés de 65 à 74 ans. Dans un communiqué, le Dr Steven J. Fleischman, président du Collège américain des obstétriciens et gynécologues, a condamné cette décision : « Il est très clair que l'infection par le Covid pendant la grossesse peut être catastrophique et conduire à un handicap majeur, et qu'elle peut avoir des conséquences dévastatrices pour les familles. » Selon les données publiées par les CDC en 2024, près de 90 % des bébés hospitalisés pour Covid étaient nés de mères non vaccinées pendant la grossesse.
Lundi 9 juin, RFK Jr révoquait tous les membres de l’Acip, un comité consultatif qui formule des recommandations sur la sécurité, l’efficacité et les besoins cliniques des vaccins auprès des CDC. Le secrétaire à la Santé a expliqué qu’un « grand nettoyage était nécessaire pour rétablir la confiance du public dans la science des vaccins ». Une décision que l’American Public Health Association a qualifié de « coup d’État ». « Le retrait de tous les membres de l'Acip d'un seul coup n'est pas le mode de fonctionnement des démocraties et n'est pas bon pour la santé de la nation, a expliqué l’association. Cette action suscite immédiatement des inquiétudes quant à la capacité de toute liste de membres du comité nommés par l'administration Trump à être considérée comme impartiale par rapport aux points de vue de RFK. » Le New York Times a expliqué que RFK Jr avait agi de cette manière en raison des liens entre des membres de l’Acip et le parti démocrate.
RFK Jr a annoncé ce 11 juin sur les réseaux sociaux avoir nommé huit nouvelles têtes à l’Acip. Ce sont des « scientifiques hautement qualifiés, des experts de premier plan en santé publique et certains des médecins les plus accomplis des États-Unis », a-t-il assuré. Parmi eux, figurent un pédiatre infectiologue ayant déjà conseillé les CDC, un biostaticien s’étant publiquement opposé lors de la pandémie de Covid-19 aux confinements promus par les autorités publiques ainsi qu’un biochimiste affectionné par les antivaccins. Nommé Robert Malone, ce scientifique, dont les travaux de recherche à la fin des années 1980 ont contribué au développement de la technologie de l’ARN messager (ARNm), s’est fait connaître du milieu antivax lors de la pandémie en relayant des thèses alarmistes et non étayées à propos des vaccins.
Rupture de contrat avec Moderna pour un vaccin ARNm contre la grippe aviaire
Entre ces deux décisions, l’administration Trump a annulé un contrat de près de 600 millions de dollars (528 millions d’euros) avec les laboratoires Moderna pour le développement d’un vaccin pour l’homme contre la grippe aviaire en utilisant la technologie de l’ARNm. Un procédé qui, pour RFK Jr, a engendré les vaccins « les plus mortels jamais créés ». « L'ARNm est une nouvelle technologie de vaccination, et les rumeurs et théories du complot concernant de prétendus effets secondaires indésirables sont omniprésentes sur Internet, déplore Marie-Louise Landry. Les études scientifiques qui contredisent les préjugés de RFK Jr ne sont pas prises en compte. Les subventions de recherche impliquant la technologie de l'ARNm ont été annulées ou ne seront pas financées. De même, les subventions destinées à étudier la méfiance à l'égard des vaccins ont été annulées. »
En revanche, une étude pour établir un lien entre la vaccination et l’autisme va bénéficier de fonds publics. Elle sera menée par David Geier, autre antivax. Après avoir annoncé des résultats pour septembre, RFK Jr s’est rétracté, le délai étant trop court pour lui donner une « crédibilité ». De premières données seront disponibles après l’été et il faudra attendre l’année prochaine pour lire l’étude complète. « La science a répondu par de nombreuses études à ce jour et aucune n'a trouvé de lien avec l'autisme, et l'étude originale du Royaume-Uni a été discréditée et retirée, rappelle Marie-Louise Landry. Cependant, lorsque les gens lisent que l'autisme est en augmentation sans explication claire, il est commode d'accuser les vaccins. Il a été rapporté que 13 à 24 % des adultes aux États-Unis pensent aujourd'hui que le vaccin ROR est à l'origine de l'autisme, ce qui représente une augmentation par rapport au passé. » Conséquence, les États-Unis subissent actuellement l’épidémie de rougeole la plus grave depuis l’an 2000, quand la maladie avait été considérée comme éliminée de leur territoire.
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