Face au Covid, les personnes avec des troubles du spectre de la schizophrénie sont plus susceptibles d’avoir une forme sévère de l’infection avec hospitalisation. De manière générale, et ce même avant la pandémie, ces patients présentent un risque plus élevé d’infection respiratoire et de mortalité associée. Pourtant, du fait du manque de preuves, les troubles du spectre schizophrénique ne sont pas pris en compte dans les politiques vaccinales priorisant les populations à risque (grippe, pneumocoque), alors que la pneumonie est l’une des comorbidités avec la plus haute mortalité chez ces patients.
Les connaissances sont aussi lacunaires quant à l’impact des antipsychotiques, qui ont une activité immunomodulatrice, causant notamment une neutropénie. L’usage de la clozapine est par ailleurs débattu lors des épidémies à large échelle. Des chercheurs danois ont exploré l’influence de l’exposition aux antipsychotiques sur la sévérité du Covid et d’autres infections respiratoires. Leurs résultats sont publiés dans le Lancet Psychiatry.
Pas davantage d’infections, mais une sévérité importante
Sur 85 000 patients, dont 31 000 exposés périodiquement à des antipsychotiques, l’étude a montré que les personnes traitées n’étaient pas plus infectées par le Covid (risque de test positif diminué avec HR = 0,91). Pour les infections sévères, les hospitalisations liées au Covid sont plus fréquentes sous antipsychotiques (HR = 1,28) mais pas les décès.
Pour ce qui est des autres infections respiratoires, le constat est alarmant. Le risque d’hospitalisation et de décès est fortement augmenté (HR = 1,61 pour les deux) et se renforce avec l’âge. L’étude retrouve plus d’hospitalisations pour Covid et pour les autres infections respiratoires, respectivement chez les plus de 70 ans et les plus de 40 ans. De même, la mortalité des personnes sous antipsychotiques est augmentée entre 50 et 59 ans ainsi qu’entre 70 et 79 ans pour les infections respiratoires non Covid.
Inclure l’usage d’antipsychotiques dans la prévention
Dans un éditorial associé, Maxime Taquet de l’université d’Oxford salue la publication qui « fournit des données précieuses sur l’association entre l’exposition aux antipsychotiques et le risque d’infections respiratoires et leur pronostic ». Et le chercheur d’origine belge d’ajouter : « Ces résultats sont importants pour éclairer les futures politiques de santé, en particulier en ce qui concerne la vaccination contre les pathogènes respiratoires courants et la préparation à de futures pandémies. Ils pourraient également informer les cliniciens sur la nécessité d'être vigilants lorsque des patients sous antipsychotiques présentent des signes non spécifiques d'infection ».
Les auteurs de l’étude défendent la mise en place de mesures préventives pour les patients de plus de 40 ans qui prennent des antipsychotiques. La clozapine n’ayant pas montré de surrisque d’infection ou de mortalité, ils conseillent de ne pas éviter des molécules en particulier mais plutôt de suivre l’observance et être plus vigilant dans ces groupes à risque.
Pour Maxime Taquet, « la distinction entre corrélation et causalité n’est pas toujours cruciale ». Il explique que prouver la causalité n’est pas nécessaire lorsqu’on détermine les groupes à risque à vacciner en priorité. Comme pour l’âge, plus facile à évaluer que la fragilité, la prise d’antipsychotiques peut être une mesure pour stratifier le risque.
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