Après avoir pointé du doigt l'impact cardiovasculaire du diclofénac, l’ANSM met à nouveau en garde contre les AINS. En cause cette fois-ci : le rôle potentiellement aggravant de l'ibuprofène et du kétoprofène en cas d'infection.
Cette alerte fait suite aux résultats de l’enquête de pharmacovigilance lancée en juin 2018 par l’ANSM suite à plusieurs signalements de complications infectieuses graves associées à la prise d’AINS pour douleur ou fièvre.
Mené par les centres régionaux de pharmacovigilance de Tours et Marseille, ce travail a passé au crible les situations de ce type en se focalisant sur l'ibuprofène et le kétoprofène, les deux AINS les plus utilisés dans cette indication. L'objectif était de déterminer si ces complications infectieuses graves étaient favorisées par la prise de l'AINS ou si elles traduisaient l'évolution de la pathologie infectieuse initiale.
Un risque même en cas d’antibiothérapie concomitante
Sur l'ensemble des signalements rapportés depuis l'année 2000, 337 cas de complications infectieuses observés avec l'ibuprofène et 49 avec le kétoprofène ont été retenus. Il s'agissait d'infections sévères de la peau et des tissus mous (dermohypodermites, fasciites nécrosantes,etc.), de sepsis, d'infections pleuro-pulmonaires (pneumonies compliquées d'abcès, de pleurésie), d'infections neurologiques (empyèmes, abcès cérébraux,) ou ORL compliquées (cellulites, médiastinites,...), à l'origine d'hospitalisations, de séquelles voire de décès.
Ces complications infectieuses (essentiellement à Streptocoque ou à Pneumocoque) ont été observées après de très courtes durées de traitement (2 à 3 jours), y compris lorsque la prise d'AINS était associée à une antibiothérapie.
L'analyse de ces données et de la littérature, « suggère que ces infections, en particulier à Streptocoque, pourraient être aggravées par la prise de ces AINS ».
L'enquête montre par ailleurs que les AINS continuent à être utilisés en cas de varicelle alors qu’il est établi qu'ils peuvent être à l'origine de complications cutanées bactériennes graves (fasciite nécrosante) et doivent donc être évités dans cette situation.
Privilégier le paracétamol
En attendant qu'une analyse collective soit engagée au niveau européen, l'ANSM « souhaite mettre en garde dès à présent sur ce risque de complication infectieuses graves susceptibles d'avoir des conséquences sérieuses pour la santé des patients ».
L'agence du médicament rappelle par ailleurs que l'utilisation du paracétamol doit être privilégiée en cas de douleur et/ou de fièvre, notamment dans un contexte d'infection courante comme une angine, une rhinopharyngite, une otite, une toux, une infection pulmonaire, une lésion cutanée ou la varicelle, en particulier en automédication.
Si un AINS est quand même utilisé, l’ANSM appelle à prescrire et utiliser les AINS à la dose minimale efficace, pendant la durée la plus courte ; arrêter le traitement dès la disparition des symptômes ; ne pas le prolonger au-delà de 3 jours en cas de fièvre et de 5 jours en cas de douleur et ne pas prendre deux AINS en même temps.
En 2013, les ORL avaient déjà tiré la sonnette d'alarme après avoir constaté une augmentation des hospitalisations pour complications de sinusites fronto-ethmoïdales dont bon nombre chez des patients traités par ibuprofène sans antibiotique.
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