La mort récente de la sœur d’Alfred de Musset, et différents travaux qui ont été publiés dans ces derniers temps sur l’autoscopie, cette hallucination par suite de laquelle le sujet croit se voir devant lui, éveillent en moi des souvenirs de littérature qui intéresseront peut-être les lecteurs du « Progrès médical ».
Aussi bien, le héros de l’aventure, Alfred de Musset, nous a-t-il habitués à trouver chez lui des particularités morbides curieuses, depuis que Depeuch nous a fait connaître le « signe de Musset » qui traduisait au dehors l’insuffisance aortique dont il était atteint.
Les auteurs qui se sont occupés de ce curieux phénomène de l’autoscopie n’ont eu garde d’oublier parmi les « sujets » ayant présenté ce trouble nerveux l’un des plus célèbres, Alfred de Musset lui-même, dont les vers suivants sont bien connus :
Devant ma table vint s’asseoir
Un pauvre enfant vêtu de noir
Qui me ressemblait comme un frère.
Si l’on en croit la « Nuit de décembre », Alfred de Musset semble avoir été plusieurs fois le jouet d’une telle hallucination :
À tous les instants de ma vie
J’ai vu partout cette ombre amie.
Mais « ombre amie » me paraît être une licence poétique et il fut au moins une circonstance dans la vie du poète où elle lui fit grand peur. George Sand nous raconte l’événement dans « Elle et Lui », et l’observation est trop bien prise pour qu’elle n’en ait pas été le témoin.
Lors d’une expédition nocturne qu’ils faisaient dans les bois, « Lui » s’étant écarté, « Elle » entendit un cri d’inexprimable détresse et, s’élançant dans la direction de la voix, elle le trouva debout, hagard, agité d’un tremblement convulsif. « Il avait eu une hallucination il avait vu passer devant lui, sur la bruyère, un homme qui courait, pâle, les vêtements déchirés et les cheveux au vent. » « Je l’ai si bien vu, dit-il, que j’ai eu le temps de raisonner et de me dire que c’était un promeneur attardé, surpris et poursuivi par des voleurs et même j’ai cherché ma canne pour aller à son secours, mais la canne s’était perdue dans l’herbe, et cet homme avançait toujours sur moi. Quand il a été tout près, j’ai vu qu’il était ivre et non pas poursuivi. Il a passé en me jetant un regard hébété, hideux, et en me faisant une laide grimace de haine et de mépris. Alors, j’ai eu peur et je me suis jeté la face contre terre car, cet homme… c’était moi ! Oui, c’était mon spectre, Thérèse ! Ne sois pas effrayée, ne me crois pas fou, c’était une vision. C’était moi avec vingt ans de plus, les traits creusés par la débauche ou la maladie, des yeux effarés, une bouche abrutie, et, malgré cet effacement de mon être, il y avait dans ce fantôme un reste de vigueur pour insulter et défier l’être que je suis à présent. »
Les particularités du récit nous permettent de penser que l’incident se passa dans la forêt de Fontainebleau lors du séjour qu’y firent les deux amants, au début de leur liaison, à l’automne de 1833. Musset avait vingt-deux ans.
(Paul Raymond in « La Presse médicale », 1905)
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