« Court, c’est mieux ! » A l’occasion des 17es Journées Nationales d’infectiologie (Lille, 7-9 juin), les Drs Claire Wintenberger (Grenoble) et Eric Bonnet (Toulouse) ont dévoilé de nouvelles recommandations de la Société de pathologie infectieuse de langue française ( Spilf) * qui invitent à réduire au maximum la durée des traitements antibiotiques.
Alors que jusqu’à présent, les actions en faveur du bon usage des anti-infectieux avaient surtout porté sur le respect des indications et le choix des molécules, la Spilf ouvre ainsi un 3e front dans la lutte contre le mésusage et la surconsommation d’antibiotiques. Déjà en 2014, la HAS avait émis une fiche mémo prônant « une durée de traitement la plus courte possible afin d’éviter la sélection de souches résistantes ». Dans la même lignée, le rapport Carlet pour la préservation des antibiotiques avait remis la question sur le devant de la scène en proposant de « limiter la durée de la première prescription d’antibiotiques à 7 jours ».
Plus généralement, « cette réflexion en faveur de durées de traitements raccourcies agite la communauté des infectiologues depuis déjà quelques années » reconnaît le Pr Pierre Tattevin (Rennes) et au cours de ces dernières années, « la littérature médicale s’est nettement enrichie en études randomisées de qualité qui démontrent que de nombreuses infections peuvent être traitées par des antibiothérapies courtes ».
Plusieurs arguments poussent dans ce sens, comme l’amélioration de l’observance, la diminution des effets secondaires potentiels ou la réduction des coûts liés aux antibiotiques. La diminution de la pression de sélection -et donc celle de l’émergence de résistances- est aussi mise en avant même si elle semble davantage discutée. Globalement, si ramener la durée de traitement en deçà de 5 jours peut avoir un effet, « quand on passe de 12 à 6 semaines, l’impact est peut-être moins évident » résume le Dr Bonnet.
Bientôt 3 jours seulement pour la pneumopathie ?
Actuellement, la plupart des durées d’antibiothérapies préconisées ne reposent pas sur un rationnel scientifique solide, avec des durées variables d’un référentiel à l’autre et des fourchettes pouvant aller du simple au double.
Dans ce contexte, le groupe de travail « recommandations » de la Spilf s’est attaché à définir, pathologie par pathologie, une durée d’antibiothérapie unique (et non plus une fourchette) la plus courte possible en reprenant à la fois les recommandations existantes et les données récentes de la littérature. Avec à la clef quelques changements notables.
Dans les pneumonies communautaires par exemple, les experts proposent désormais 5 jours de traitement pour l’enfant de plus de 2 ans et 7 j fermes pour l’adulte, alors que les guidelines proposent traditionnellement « 7 à 10 j ». « Une évolution clinique et/ou biologique favorable pourrait permettre de réduire encore la durée », soulignent les experts, des études récentes suggérant qu’un traitement de 3 j pourrait faire aussi bien.
Autre tour de vis notable : dans les infections de la peau et des tissus mous, la durée de traitement préconisée n’est plus que de 7 j pour les dermo-hypodermites bactériennes, érysipèle compris.
Par ailleurs, dans la lignée des dernières recommandations françaises sur les infections urinaires, les experts retiennent une durée de 7 j seulement pour les pyélonéphrites aiguës. Pour les infections urinaires masculines la barre reste à 14 j mais avec là encore des études en cours qui pourrait permettre de revoir à la baisse cette durée.
Même dans les infections ostéoarticulaires, la Spilf bouscule les habitudes en proposant par exemple de réduire de moitié (6 semaines au lieu de 12) le traitement d’une spondylodiscite.
Reste que toutes les pathologies ne peuvent pas se prêter à l’exercice. « Par exemple pour la tuberculose des essais ont montré qu’un traitement de 4 mois au lieu de 6 exposait à davantage de rechutes » nuance le Pr Tattevin
Reste aussi à savoir comment ces préconisations seront accueillies par les praticiens de terrain. Dans un travail de thèse mené en médecine générale par le Dr Marianne Giry (Nancy), 78 % des médecins interrogés se disaient favorables aux durées uniques d’antibiothérapie pour réduire les durées de traitement… mais seulement 50 % d’entre eux voyaient d’un bon œil la limitation de la durée du traitement à 7 jours pour une prescription initiale.
* Travail du groupe "recommandations" de la Spilf, à paraître prochainement dans la revue médecine et maladies infectieuses
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