Si les indications de l’immunothérapie sont bien établies dans le mélanome, en onco-urologie, etc., les cancers digestifs sont restés jusque-là plutôt en marge de cette révolution thérapeutique. La donne a changé avec la présentation aux e-JFHOD 2020 (et sa parution dans le NEJM*) de l’étude IMbrave150, premier essai concluant d’immunothérapie dans les cancers digestifs, en l’occurrence le carcinome hépatocellulaire (CHC). « C’est une réelle innovation pour deux raisons, explique le Pr Michel Ducreux (institut Gustave-Roussy, Villejuif), co-auteur de l’étude : d’une part la thérapie de référence dans le CHC – l’inhibiteur de multikinases sorafénib – faisait preuve d’une efficacité modeste et d’une tolérance médiocre, d’autre part les données dont nous disposions avec l’immunothérapie seule dans des cancers avancés étaient en demi-teinte avec des résultats peu probants ».
Amélioration de la survie
La conclusion de cette étude de phase 3 internationale menée sur 501 patients « est sans appel, poursuit le Pr Ducreux. Elle est la première à mettre en évidence un bénéfice net de l’immunothérapie (atezolizumab) sur la survie globale et la survie sans progression dans les CHC avec fonction hépatique conservée (hors volumineuses varices œsophagiennes) et ce, parmi l’ensemble des sous-groupes de patients et quelle que soit l’étiologie de la cirrhose. » Deux éléments contribuent à ces bons résultats. D’une part, « l’immunothérapie est prescrite en première ligne chez des malades naïfs de traitement, et non pas en situation d’échec du sorafénib par exemple, détaille l’expert. D’autre part, elle est donnée en association avec le bévacizumab, un anti-angiogénique qui, en outre, renforce l’effet de l’immunothérapie. »
Dans cette étude, la médiane de survie globale était de 13,2 mois pour le sorafénib et non atteinte pour l’association (suivi médian de 8,6 mois). En ce qui concerne la survie sans progression, la médiane est atteinte dans les deux bras, respectivement à 4,3 mois vs 6,8 mois. Le taux de réponse tumoral est plus que doublé (12 % vs 27 %).
Les effets secondaires rapportés par environ 20 % des patients avec la combinaison atézolizumab/bévacizumab sont l’HTA, la fatigue et une protéinurie. Bien qu’utilisé chez des patients ayant un risque d’hémorragie digestive par rupture de varices œsophagiennes, « il n’y a pas eu d’alerte avec le bévacizumab, pourtant plus anti-angiogénique que le sorafénib », précise Michel Ducreux. Le délai médian jusqu’à détérioration de la qualité de vie est de 3,6 mois pour le sorafénib vs 11,2 mois pour la combinaison atézolizumab/bévacizumab.
Ainsi, « cette combinaison doit désormais être considérée comme le nouveau standard de traitement systémique de première ligne », conclut le Pr Ducreux. Actuellement disponible en ATU, l’atézolizumab devrait obtenir prochainement une AMM dans cette indication.
* N Engl J Med, 2020; 382:1894-1905
Timide percée dans d’autres cancers digestifs
Si l’immunothérapie s’impose désormais dans le CHC, il n’y a rien à l’horizon dans le cancer de l’estomac métastasé, ni dans le cancer du pancréas. L’immunothérapie pourrait néanmoins avoir un intérêt dans le carcinome épidermoïde de l’œsophage en combinaison avec la chimiothérapie, dans le cancer épidermoïde du canal anal et dans les cancers du côlon métastasés avec instabilité des microsatellites (20 % des cancers du côlon). L’étude KeyNote-177, conduite dans cette catégorie de cancers du côlon et présentée à l’ASCO en mai par le Pr André Thierry, a d’ailleurs confirmé que l’immunothérapie seule vs le traitement standard (chimiothérapie) en première ligne permettait d’obtenir de meilleurs résultats en termes d’efficacité (- 40 % du risque de progression) et de tolérance.
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