Un peu plus d’un mois après les déconvenues du molnupiravir, les traitements spécifiques du Covid-19 arrivent en ville. En effet, la Haute Autorité de santé (HAS) a attribué une autorisation d’accès précoce au Paxlovid (nirmatrelvir/ritonavir), antiviral chimique anti-SARS-CoV-2 développé par Pfizer pour le traitement précoce du Covid-19 chez les sujets à haut risque d’aggravation. Dans la foulée, l’Agence européenne des médicaments (EMA) a même accordé une AMM conditionnelle au produit.
À l’origine de ce feu vert : des essais précliniques et cliniques ayant montré « une réduction du risque de progression vers une forme sévère du Covid-19 d’environ 85,2 % après administration (du Paxlovid) », résume la HAS. De plus, tandis que la plupart des anticorps monoclonaux anti-SARS-CoV-2 disponibles ont perdu tout ou partie de leur efficacité contre Omicron, l’activité de l’antiviral se maintiendrait contre le variant. Une robustesse qui pourrait s’expliquer par son mécanisme d’action, qui ne cible pas la protéine Spike du virus (très sujette aux mutations) mais sa protéase 3C-like, nécessaire à la réplication virale.
Un traitement oral de 5 jours
En outre, le Paxlovid apparaît plus facile à utiliser que les anticorps monoclonaux. Alors que ceux-ci ne sont actifs que par voie parentérale, le nirmatrelvir-ritonavir est efficace per os : le traitement se présente sous forme de comprimés (« 2 comprimés de nirmatrelvir et 1 comprimé de ritonavir à prendre 2 fois par jour pendant 5 jours »). De quoi « faciliter son accessibilité en ville », s’enthousiasme la HAS. De fait, le Paxlovid est le premier traitement du Covid-19 ouvert au secteur ambulatoire, et les généralistes devaient pouvoir le prescrire « dès la fin du mois de janvier ». Toutefois, son maniement n’est pas si simple.
Comme les anticorps synthétiques, le Paxlovid requiert une grande réactivité. Car il doit être administré « dès que possible après le diagnostic (…) et au maximum dans les 5 jours suivant l’apparition des symptômes ». D’où la nécessité de repérer rapidement les patients éligibles : patients de plus de 12 ans (et de plus de 40 kg) ne nécessitant pas d’oxygénothérapie mais à risque élevé d’évolution vers une forme grave. À savoir, d’une part, les sujets « sévèrement immunodéprimés ou présentant une pathologie à très haut risque de forme grave » (cancers en cours de traitement, polypathologies, trisomie 21, etc.), et d’autre part les patients « au-delà de 65 ans (en particulier non vaccinés) présentant des facteurs de risque de (…) forme grave » (diabète, obésité, insuffisance rénale, cardiaque ou respiratoire, etc.).
Attention aux interactions médicamenteuses
Mais du fait de la présence dans sa composition de ritonavir, connu pour inhiber le CYP3A, le Paxlovid est surtout à l’origine d’interactions médicamenteuses. Certaines, qui concernent des molécules qui « dépendent fortement du CPY3A », constituent des contre-indications formelles à la prise concomitante du Paxlovid, souligne la HAS dans des « réponses rapides » destinées aux prescripteurs (voir encadré). « Il existe (par ailleurs) une liste importante de médicaments qui ne sont pas contre-indiqués mais qui nécessitent une adaptation du traitement et une surveillance rapprochée. » C’est par exemple le cas d’immunosuppresseurs, d’antirétroviraux ou de chimio- et immunothérapies utilisées en oncologie. Autant de traitements qui peuvent justement concerner des patients potentiellement éligibles à l’antiviral. Sont également concernées des molécules d’usage courant telles que certaines statines, des anticoagulants, le zolpidem, l’éthinylestradiol, etc.
De même, si l’insuffisance hépatique ou rénale sévère contre-indique le traitement, l’insuffisance rénale modérée peut, elle, donner lieu à une adaptation des posologies de Paxlovid. « Par ailleurs, il n’est pas recommandé d’utiliser le Paxlovid pendant la grossesse », souligne la HAS. D’ailleurs, les directives d’utilisation pré-AMM publiées mi-décembre par l’EMA préconisaient d’éviter le Paxlovid chez les femmes enceintes et allaitantes, voire chez les femmes sans contraception qui pourraient tomber enceintes.
Médicaments dont la prise concomitante avec le Paxlovid est contre-indiquée
Alfuzosine, péthidine, piroxicam, propoxyphène, ranolazine, nératinib, vénétoclax, amiodarone, bépridil, dronédarone, encaïnide, flécaïnide, propafénone, quinidine, colchicine, astémizole, terfénadine, lurasidone clozapine, pimozide, quétiapine, dihydroergotamine, ergonovine, ergotamine, méthylergonovine, acide fusidique, lovastatine, simvastatine, lomitapide, avanafil, sildénafil, vardénafil, clorazépate, diazépam, estazolam, flurazépam, midazolam oral et triazolam, millepertuis, carbamazépine, rifampicine.
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