« J’avais prévenu les internes en psychiatrie le 2 novembre dernier lors de leur arrivée dans le service qu’ils seraient peut-être amenés à prendre en charge des victimes du terrorisme. Je ne pensais évidemment pas que le réel nous rattraperait si rapidement », témoigne le Dr Nicolas Dantchev (cellule d’aide médico-psychologique Hôtel-Dieu). Certes, le dispositif mis en place ne relève pas encore de la routine. Mais il n’est plus malheureusement expérimental. « En cas d’attentats, nous avons vocation à accueillir 200 consultants par jour. 20 à 30 minutes sont nécessaires pour aménager les locaux », précise le Dr Dantchev.
Le 13 novembre dernier, le protocole n’a pas essuyé de retard. À 23h30, 35 psy étaient prêts à accueillir les premiers patients. Les praticiens hospitaliers ont répondu présents, mais aussi les médecins libéraux qui ont spontanément offert leur aide. Dans les premières heures, le dispositif a été peut-être surdimensionné. 80 patients sont venus consulter le samedi et le dimanche. Le chiffre a bondi lundi. Les « impliqués » selon le vocabulaire des spécialistes de ce type de prise en charge, ne présentaient pas alors que des traumatismes psychiques. « Nous avons aussi diagnostiqué des blessures physiques qui sont pas inaperçues dans les premières heures », témoigne le Dr Dantchev.
Si le service est ouvert aux victimes, il propose aussi une prise en charge aux professionnels de santé, notamment les équipes qui ont pris en charge les premières victimes. Mercredi 18 novembre, 37 prises de rendez-vous avaient déjà été effectuées. Mais « nous allons aller au-delà. Je prendrai contact avec les personnels hospitaliers qui n’ont pas l’habitude de ce type de débriefing ».
Les attentats du 13 novembre dépassent en vérité tout ce que certains soignants ont la capacité de supporter. Comment qualifier la douleur de certaines équipes radio qui ont reçu les cadavres afin de leur faire subir des examens radios, des scanners avant leur transfert à l’Institut médico-légal ? Comment aider à alléger la souffrance ?
L’horreur déjà observée lors des attentats de Charlie et de l’Hypercasher a été pulvérisée. Les consultants sont beaucoup plus jeunes. Ils sont parfois doublement impliqués lorsqu’ils étaient venus en couple par exemple au Bataclan. Ils développent à la fois la culpabilité du survivant et la douleur du deuil en cas de décès. Le nombre de patients confrontés à la vision de cadavres a par ailleurs été très élevé.
Des enseignements ont toutefois été tirés des évènements tragiques du 7 et 9 janvier dernier. Une cohorte de 500 impliqués a ainsi fait l’objet d’un suivi dans l’étude Impacts. Résultats principaux, si la prise en charge se révèle performante dans les premiers jours, les personnes s’estiment rapidement abandonnées et ne savent pas à quel professionnel s’adresser en cas de besoin. La leçon a été retenue. Les consultants venus après le 13 novembre disposent tous d’un nouveau rendez-vous afin d’optimiser le suivi et déceler les éventuels besoins. Un certificat d’incapacité temporaire est également rédigé. Ce qui leur permettra ensuite de bénéficier de statut de victime d’attentat.
Après avoir tant entendu, les cellules d’aide médico-pyschologique seront-elles également bénéficiaires d’une écoute ? « Oui, un débreffing est prévu avec le Pr Thierry Baubet. »
À suivre.
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