La santé risque-t-elle d’être la variable d’ajustement du budget de l’Etat ?
Pour la première fois, la santé a été l’un des thèmes débattus lors de la dernière campagne présidentielle. Le président de la République a nommé une ministre qui connait de l’intérieur toutes les subtilités du système de santé. Pour la première fois, il est annoncé la mise en œuvre de réformes qui devraient modifier le pays en profondeur. Si l’on recentre sur la santé, ce nouvel état d’esprit devrait permettre d’aborder le débat autour du médicament non plus par le seul angle de son coût. Actuellement, on regarde peu la valeur que le médicament apporte à la collectivité. Des malades mieux traités ou guéris coûtent moins cher à la société. Je suis heureux d’entendre le président de la République parler d’un système réformable et qui doit être réformé.
Qu’attendez-vous du PLFSS 2018 ?
Nous attendons d’abord de la visibilité mais aussi que le médicament ne soit pas évoqué en fin de budget, lorsqu’il s’est avéré impossible pour les pouvoirs publics de réaliser des économies dans d’autres secteurs de la santé. Or l’industrie pharmaceutique génère des emplois, exporte et contribue de manière positive à la balance commerciale. Le médicament innovant participe activement au décloisonnement ville-hôpital. Alors que la population vieillit en meilleure santé, comparée aux décennies passées et que l’on se félicite du retour de l’innovation, il serait temps de sortir pour le médicament de son image négative. En dépit des discours ambiants sur l’inflation du coût des médicaments, le budget médicament en France en dix ans a été contenu. Le débat doit être dépassionné, raisonnable, sortir de l’émotion. Quant au taux de croissance du médicament, il doit être le reflet des transformations sociétales générées par l’innovation thérapeutique.
L’accès à l’innovation est-il en France contingenté ?
Je vais vous répondre en prenant l’exemple des maladies rares, à mon sens emblématique. En 2004, un système du caping a été mis en place, à une époque où l’on ne soupçonnait pas l’essor de la médecine personnalisée. L’industriel se voit imposer un coût forfaitaire, pour une population cible donnée, avec l’obligation de traiter tous les malades. Or, l’épidémiologie ne permet pas toujours de dénombrer avec précision pour des maladies rares, par exemple, le nombre de patients éligibles au traitement. Quant au prix, il est désormais proposé au plus bas au niveau des grands pays européens. La France, pour développer l’industrie du médicament, pourrait jouer un rôle moteur et accepter de payer un prix dans la moyenne européenne par exemple.
Certains prétendent par ailleurs opposer le prix du médicament et la sauvegarde de l’emploi à l’hôpital. Or l’enveloppe dédiée aux médicaments n’a évidemment rien à voir avec les réformes jugées nécessaires dans l’organisation des soins. En revanche, le bénéfice thérapeutique généré par les innovations doit questionner l’organisation de l’hôpital. Les robots, les transformations profondes en imagerie, les big data, la e-santé auront un impact bien supérieur sur l’organisation de l’hôpital que le médicament, dans les années à venir.
La Commission de la transparence a été très critiquée par les industriels du médicament. Quel est votre regard ?
C’est objectivement le pivot du système d’accès au médicament en France. La puissance publique devrait donc lui octroyer davantage de ressources pour lui permettre d’évaluer les dossiers dans des conditions améliorées en permettant, par exemple, le recours systématique à une expertise extérieure, lorsque celle-ci est indispensable à la parfaite analyse d’un dossier complexe de demande de remboursement. La publication du relevé des débats des séances de la Commission de la transparence a permis à notre système d’évaluation de gagner en transparence mais également de confirmer que celui-ci doit être optimisé.
La liste en sus doit-elle être réformée ?
La gestion de la liste en sus doit s’intégrer dans une réforme plus large du financement de l’hôpital et des besoins des patients. Le décret promulgué en 2016 a durci, de manière importante, les conditions d’accès à cette liste de financement indispensable et crée, par son application stricte, des situations de perte de chance pour les patients français. Tous comprennent la nécessité de réguler entrées et sorties des produits de cette liste. Il s’avère que le choix du décret, qui rigidifie le système, n’est pas optimal.
Deux nouveaux traitements sont en voie de commercialisation en France dans la polyarthrite rhumatoïde et la dermatite atopique sévère. Les enjeux sont importants pour Sanofi Genzyme.
Ils le sont d’abord pour les patients et la communauté médicale. C’est aussi le fruit d’un long partenariat avec Regeneron avec l’espoir de nous implanter durablement dans de nouvelles ères thérapeutiques. En ce qui concerne la polyarthrite rhumatoïde c’est une maladie chronique invalidante sévère qui bénéficie d’une offre thérapeutique diversifiée. Pour autant, les patients ne sont pas tous soulagés par les traitements jusqu’ici disponibles. Un grand nombre de produits de la même classe thérapeutique sont actuellement indiqués dont on connaît les effets mais aussi les limites. Un seul anticorps monoclonal humain qui se lie aux récepteurs de l’interleukine 6 (IL-6R) est à ce jour prescrit, mais de manière encore trop modeste par rapport aux potentialités thérapeutiques de cette classe. Notre biothérapie est un anti-Il-6R de nouvelle génération avec un mode d’administration simplifié. Cela devrait aider à l’observance. Le lancement en France est prévu en mai 2018.
Pour la dermatite atopique sévère, l’offre thérapeutique est à ce jour quasi inexistante.
Le lancement de notre médicament est programmé en France en septembre 2018. La dermatite atopique sévère est la première indication d’un large plan de développement où sont programmées des études dans l’asthme et la polypose nasale. Actuellement, l’offre thérapeutique est très restreinte dans la dermatite atopique sévère, maladie désocialisante avec des répercussions graves sur la qualité de vie. Sur deux millions de patients suivis pour eczéma, 100 000 seraient traités pour une dermatite atopique sévère. Le périmètre de notre médicament est encore plus limité. Il concernera 20 000 patients dans l’Hexagone environ. Ce médicament est disponible via le dispositif de l’ATU de cohorte.
L’enjeu de communication aura pour objectif de rappeler la sévérité de la maladie, le fardeau qu’elle représente pour les patients. Il s’agira ensuite de permettre au corps médical d’informer les malades concernés, de la mise au point d’un nouveau traitement efficace dans cette pathologie.
Quels sont les produits aujourd’hui en développement ?
Un médicament dans la maladie de Pompe, le NeoGAA, devrait contribuer par une meilleure pénétration que les produits existants à en optimiser l’efficacité. Toujours dans les maladies rares une enzymothérapie de substitution est en développement dans la maladie de Nieman Pick B. En oncologie, un anti-CD 38 est en cours de développement dans le myélome multiple. En immuno-oncologie, un inhibiteur PD-1 fait l’objet d’essais dans le carcinome épidermoïde. Nous continuons notre effort de recherche dans la sclérose en plaques. Mais nous nous ouvrons à d’autres spécialités comme l’ophtalmologie.
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