Les analogues du GLP-1 (aGLP-1) et les inhibiteurs du SGLT2, indiqués dans le diabète de type 2 (DT2), arriveront-ils dans le diabète de type 1 (DT1) ? Alors que des données d’observation montrent leur intérêt dans le type 1 pour le contrôle glycémique, la perte de poids, la cardio- et la néphroprotection, ces médicaments sont d’ores et déjà prescrits, hors indication de mise sur le marché.
« En pratique, des patients initialement DT1 se voient proposer des aGLP-1, c’est un grand sujet d’actualité en réponse à l’augmentation du surpoids et de l’obésité dans le diabète de type 1, de plus en plus observée chez les jeunes, témoigne au Quotidien le Pr Éric Renard, président de la Société francophone du diabète (SFD) et chef du service endocrinologie et diabétologie au CHU de Montpellier. C’est moins vrai pour les iSGLT2, qui comportent un risque élevé d’acidocétose, même s’ils sont parfois prescrits. »
Aux États-Unis, environ un tiers des patients DT1 est sous aGLP-1, notamment à cause du surpoids et de l’obésité
Pr Éric Renard, président de la Société francophone du diabète
Le double diabète
Selon le Pr Renard, le DT1 présente un glissement vers le DT2. « Nous rencontrons de plus en plus de patients DT1 présentant un surpoids ou une obésité et des caractéristiques de DT2, comme l’insulinorésistance, explique le président de la SFD. Nous qualifions cela de double diabète. » Ainsi, pour ces patients, sans prédominance de sexe ni d’âge, les molécules indiquées dans le DT2 présentent un intérêt dans le type 1. « Aux États-Unis, environ un tiers des patients DT1 sont sous aGLP-1, notamment à cause du surpoids et de l’obésité », complète-t-il.
En Europe et aux États-Unis, les sociétés savantes planchent sur l’introduction de la notion de double diabète dans leurs recommandations
Pour l’endocrino-diabétologue, l’amélioration des insulinothérapies contribue à faire émerger le phénomène. Auparavant, les mauvais contrôles glycémiques ont pu être attribués à des performances insuffisantes des traitements plutôt qu’à l’existence d’un diabète mixte. « Mais l’arrivée de nouvelles insulinothérapies très efficaces montre que le problème subsiste et que des patients non contrôlés ne souffrent pas d’un diabète strictement DT1 », analyse-t-il. Les sociétés savantes du diabète, aux États-Unis (ADA) et en Europe (EASD), planchent ainsi actuellement sur l’introduction de la notion de double diabète dans leurs prochaines recommandations. Une déconstruction de la nosologie actuelle profitable pour la prise en charge thérapeutique des patients atteints de diabète(s).
De récents travaux (1) présentés au congrès 2025 de l’ADA ont montré l’efficacité du sémaglutide chez des patients DT1 obèses sous boucle fermée. Le sémaglutide en adjuvant a permis à 36 % du groupe sémaglutide d’atteindre le critère composite principal (plus de 70 % du temps passé dans la cible glycémique 70-180 mg/dl et moins de 4 % du temps passé avec une glycémie < 70 mg/dl) contre 0 % dans le groupe placebo. « Cette étude démontre ce que nous savons déjà en pratique, commente le Pr Renard. Le traitement par aGLP-1 permet un meilleur contrôle du diabète et améliore la réponse à l’insuline. De plus, il permet une perte de poids chez les sujets en surpoids ou en obésité. »
Enfin, une revue narrative (2), rapporte un bénéfice du sémaglutide et du tirzépatide chez les patients DT1 sur le contrôle glycémique, la perte de poids, le métabolisme énergétique ou encore la fonction des cellules bêta. Pour ce qui est des effets indésirables, leur proportion et leur nature sont similaires à celles observées pour les patients obèses ou DT2. « En résumé, il ne semble pas y avoir de frein à l’introduction des aGLP-1 chez les DT1 pour ces problématiques », estime le Pr Éric Renard.
Un espoir avec les capteurs de cétones
Pour les iSLGT2, la réflexion est plus complexe en raison du risque d’acidocétose. Pourtant, la cardio- et la néphroprotection se retrouvent chez les patients DT1 avec une pathologie cardiaque ou rénale préexistante. « Les iSGLT2 sont très efficaces et apportent un bénéfice supplémentaire par rapport aux thérapies actuelles pour ces patients, mais il faut rester très prudent et en discuter entre spécialistes », prévient l’endocrino-diabétologue.
Une trithérapie comprenant un iSLGT2, un anti-aldostérone non stéroïdien et un inhibiteur de l’enzyme de conversion serait très intéressante, selon le spécialiste. L’éducation thérapeutique sur le risque d’acidocétose est indispensable, ainsi qu’une bonne autogestion de la maladie. À ce titre, « l’arrivée imminente des capteurs de cétones » pourrait changer les choses. De plus, quelques études évaluant un iSGLT2 en adjuvant à l’insuline chez le patient DT1 sans cardio- ou néphropathie montrent un intérêt pour le contrôle glycémique chez l’adulte et même l’adolescent (3). « Le rationnel existe aussi pour les iSGLT2, mais des recommandations sont encore prématurées », conclut le Pr Éric Renard.
(1) V.N. Shah et al., NEJM Evidence 2025.
DOI : 10.1056/EVIDoa2500173
(2) M. Infante et al., Journal of Clinical Medicine.
DOI : 10.3390/jcm14041303
(3) F.H. Mahmud et al., Nature Medicine 2025.
DOI : 10.1038/s41591-025-03723-6
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