La Sécu pointe une nouvelle fois les généralistes comme étant les mauvais élèves du système de santé, à propos du dosage des PSA (1) chez les hommes de plus de 50 ans : « la quasi-totalité de ces examens (88 %) est prescrite par un médecin généraliste… et provoque de nombreuses complications irréversibles induites par des traitements inappropriés. »
Si je sais bien traduire ce texte émis par la Sécu, les urologues, dont le nom n'est pas cité, ne le dosent que dans 12 % des cas, et sont donc les bons élèves.
Si je sais bien lire ce texte, entre 50 et 69 ans, seulement 62 % des hommes ont eu un dosage des PSA, et dans 90 % des cas par des généralistes dans le cadre de bilans systématiques, fourre-tout donc irraisonné. Au fait, dans le cadre des bilans de la Sécu, qu'en est-il ? Il est vrai, ça doit être comptabilisé chez les généralistes, puisque ce sont eux qui sont appelés pour faire ces bilans Mais il y a d'autres manières de faire des statistiques : car si on peut supposer que 62 % de la patientèle d'un généraliste a eu un dosage de PSA, on peut aussi supposer que 100 % de la patientèle d'un urologue a eu un dosage de PSA, et que les 12 % comptabilisés à leur encontre correspondent à ce que les généralistes n'ont pas fait quand les patients arrivent chez eux.
Si je sais bien traduire les propos de la Sécu, le généraliste est déclaré le grand responsable des complications irréversibles induites par des traitements inappropriés, pourtant décidés par les urologues dont le nom n'est jamais cité par la Sécu (pour ne pas les froisser), alors que ce sont eux et eux seuls qui doivent assumer la responsabilité de la décision de traiter et de ses conséquences.
Les généralistes sont vraiment les mauvais de chez mauvais, mais c'est le discours habituel de la Sécu envers eux. On s'y habitue ; ils sont incapables de réaliser les dépistages officiellement reconnus efficaces des cancers colo-rectaux, du sein, il leur faut une carotte sous forme de ROSP pour qu'ils agissent. Et quand le dépistage ne sert à rien, puisque non reconnu officiellement, comme avec le dosage des PSA, ils se ruent dessus ! Mais qui les a formés ?, devraient-ils hurler.
Le retard de diagnostic, situation redoutée par tous les généralistes...
Je me souviens d'un patient, avec lequel j'avais pris des gants (au double sens du terme) pour lui proposer un toucher rectal de double dépistage. Il a refusé en me disant que j'avais des mœurs douteuses, et je ne l'ai plus jamais revu.
Je me souviens d'une patiente à qui je voulais faire un frottis ; elle m'a dit que son mari ne l'avait jamais vu toute nue, et qu'elle n'allait pas commencer avec moi.
Je me souviens d'une patiente à qui je voulais examiner les seins… Elle aussi a refusé, au motif qu'elle devait passer un mammotest, qui est revenu négatif. Sauf qu'elle avait senti une boule dans un sein, qu'elle me l'a dit seulement quelques mois plus tard, angoissée du fait qu'ils n'aient rien vu… et avec raison car elle avait deux cancers.
Je me souviens d'un patient à qui je n'ai pas fait de PSA ; il était suivi depuis 6 mois par un urologue pour un cancer de la vessie, quand ce dernier lui a demandé, après moult TR, s'il avait eu un dosage de PSA prescrit par moi. Le patient me téléphone furieux, car les PSA étaient élevés, alors qu'en 6 mois il avait vu plus souvent l'urologue que moi, depuis que je le connaissais. Situation crainte par tous les généralistes qui risquent de se retrouver devant les tribunaux pour retard de diagnostic…
Alors effectivement, avec les PSA, c'est facile, pas besoin d'examen clinique. Les gens ne croient plus en Dieu, mais se faire proposer de toucher leurs seins, de se faire mettre un doigt par-devant ou par-derrière, c'est toujours péché mortel dans l'esprit des gens, sauf quand ils le demandent eux-mêmes en allant directement chez le spécialiste du toucher demandé. Je dirais même, c'est pire maintenant qu'il y a trente ans, car visiblement, on revient progressivement au moyen âge dans ce domaine.
(1) Voir le Généraliste n° 2753 du 25 mars 2016
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