« Un changement majeur est en train de se produire aux États-Unis : la science y est attaquée, entravée, et même interdite », s’alarment dans une tribune publiée dans Le Monde Yasmine Belkaid, immunologiste, directrice de l’Institut Pasteur et la Pr Bana Jabri, pédiatre et immunologiste, à la tête de l’Institut Imagine.
Alors que Donald Trump n’a cessé depuis son investiture de porter atteinte à la science et à la recherche, « les scientifiques doivent faire entendre leur voix (…) Il est de notre responsabilité de protester contre ce qui obère l’avenir du monde », écrivent les deux chercheuses, formées en France et ayant travaillé aux États-Unis. Et de dénoncer « un coup très violent porté à la liberté d’expression, à la créativité, à la recherche » et un « obscurantisme assumé » qui « touche des domaines aussi cruciaux que la lutte contre les maladies infectieuses, l’étude de la santé reproductive ou la science du climat ».
« Certains sujets sont même désormais interdits, comme l’étude des différences entre les sexes dans les maladies », déplorent-elles, moins d’une semaine après que l’Académie de médecine s’est émue du retrait américain de l’aide sanitaire mondiale. Leurs voix rejoignent aussi celle de la Pr Agnès Buzyn, qui vient de lancer le think tank Évidences, dédié à la défense de la science. « La science n’est pas juste l’objet des scientifiques, elle est indispensable au progrès, à la souveraineté et, depuis l’époque des Lumières, à la démocratie », expliquait l’ancienne ministre dans nos colonnes.
Accueil des chercheurs américains
La Pr Bana Jabri et Yasmine Belkaid exhortent les « scientifiques du monde entier et les dirigeants des démocraties libérales européennes » à « garantir que la liberté d’expression, la créativité et la diversité des idées restent au cœur de la recherche ». La science est universelle, défendent-elles, aussi « ne plus investir dans les jeunes scientifiques américains compromet-il l’émergence de la prochaine génération de chercheurs à l’échelle mondiale ».
Les directrices scientifiques invitent l’Europe à lancer un grand programme d’accueil des scientifiques américains, pour recevoir en particulier les jeunes chercheurs prêts à lancer leur programme de recherche et ceux qui travaillent sur des sujets censurés : changement climatique, maladies infectieuses, recherche reproductive.
L’enjeu n’est pas seulement moral : « cette initiative représente une opportunité stratégique et économique pour l’Europe (…) Nous renforçons notre souveraineté scientifique, attirons des talents de premier plan et stimulons l’innovation dans nos laboratoires et universités », font-elles valoir, rêvant d’une Europe qui soit « un véritable foyer intellectuel et scientifique ».
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