Près d’un an après le début de l’épidémie, force est de constater que chez certains patients, les symptômes du Covid jouent volontiers les prolongations. Selon certaines études anglaises, le phénomène pourrait même concerner près de la moitié des patients 4 semaines après le début de l’infection aiguë et plus de 10 % après 6 mois. Soit l'équivalent en France d'environ 300 000 patients.
Alors que les médecins de premier recours sont de plus en plus confrontés à cette question dans leur cabinet et que les témoignages de patients se multiplient sur les réseaux sociaux, la HAS vient de publier un avis sur le diagnostic et la prise en charge de ces symptômes prolongés du Covid-19.
S’il acte une reconnaissance officielle du problème, ce travail se veut surtout une aide pour les praticiens. « Les médecins de premier recours voient arriver dans leur cabinet des personnes qui ont des symptômes qui durent et qui les inquiètent. Face à ces symptômes prolongés encore mal connus, il n’est pas facile pour eux de savoir quoi faire et ils peuvent parfois se sentir un peu démunis, a souligné le Pr Dominique Le Guludec, lors d’une conférence de presse. C’est pour cela que, même si les données scientifiques sont encore limitées, nous publions aujourd’hui nos réponses rapides pour les aider à identifier et à prendre en charge ces patients, tout en évitant l’escalade thérapeutique ».
En préambule, la HAS définit quels sont les patients concernés. Il s’agit « des personnes ayant eu un Covid confirmé ou probable et qui présente encore au moins un des symptômes initiaux 4 semaines après le début de la phase aiguë sans qu’aucun de ces symptômes ne puisse être expliqué par un autre diagnostic », résume la présidente de la HAS.
Un phénomène courant même après un Covid peu sévère
Ces symptômes prolongés peuvent survenir « même chez des personnes ayant fait des formes peu sévères », souligne le Dr Pierre Gabach, chef du service des bonnes pratiques professionnelles à la HAS.
Il s’agit le plus souvent de fatigue, de troubles neurologiques (cognitifs, sensoriels, céphalées), de troubles cardio-thoraciques (douleurs et oppressions thoraciques, tachycardie, dyspnée, toux) et de troubles de l’odorat et du goût. Des douleurs, des troubles digestifs et cutanés sont également fréquents. « Ces symptômes sont polymorphes, et peuvent évoluer de façon fluctuante sur plusieurs semaines ou mois » poursuit Pierre Gabach.
Face à ces symptômes, « il faut éliminer une complication de la phase aiguë qui a pu passer inaperçue (telle une péricardite, une myocardite, etc.) et une décompensation d’une maladie chronique ».
Le caractère polysymptomatologique et fluctuant de ces manifestations cliniques « générant des interrogations et des inquiétudes pour les patients et les cliniciens », la HAS invite les médecins « à faire preuve d'écoute et d'empathie envers leurs patients souffrants de symptômes prolongés, et à les rassurer quant aux possibilités de prise en charge et au caractère temporaire et réversible de leur situation ».
Une place centrale pour la rééducation
Sur le plan thérapeutique, les traitements actuels sont essentiellement symptomatiques. La HAS déconseille tous les régimes alimentaires d’éviction, les vitamines et suppléments en vente libre, « qui sont inutiles et potentiellement nocifs en automédication » estime le Dr Gabach. Par ailleurs « nous n’avons pas d’élément pour recommander des approches telles que l’acupuncture, l’auriculothérapie et l’ostéopathie qui n’ont pas démontré leur efficacité dans ce contexte ».
Par contre, « la rééducation du malade a une place centrale ». Selon les symptômes, il peut s’agir d’une rééducation respiratoire, d’une rééducation olfactive ou de réentrainement à l’effort.
En l’absence de contre-indications, la HAS appelle aussi à inciter les patients à continuer avoir des activités physiques même modérées.
Le cas échéant « l’exploration de troubles anxieux et dépressifs, de troubles fonctionnels et la proposition d'un soutien psychologique sont à envisager à toutes les étapes du suivi ».
Des troubles authentiques
Pour autant, dans le cas du Covid, « dans la grande majorité des cas, on ne pense pas qu'il s'agisse de troubles psychosomatiques, nuance le Pr Dominique Salmon-Cerron, présidente du groupe de travail à l'origine de l'avis de la HAS. Les patients ont réellement des troubles mais ils sont parfois tellement effrayés par leurs symptômes que que cela les bloque complètement et ils n'osent pas reprendre leur activité. Le risque alors est d'entraîner une pérennisation des troubles, une anxiété, etc. »
Actuellement les causes de ces symptômes prolongés restent encore mal connues. Les femmes jeunes étant les plus représentées , la piste hormonale a été évoquée. Compte tenu d'une forte proportion de personnes allergiques parmi les patients concernés, l'hypothèse d'une origine dysimmunitaire a aussi été avancée. L’évolution se fait en règle vers une amélioration à un rythme variable selon les patients.
À côté de ces considérations plutôt générales, la HAS propose 10 fiches techniques précisant les explorations nécessaires et les traitements de premier recours pour les principaux symptômes identifiés.
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