C’est une régression singulière pour un pays industrialisé. En France, la mortalité infantile augmente de façon significative depuis 2012. Telle est la conclusion d’une étude fondée sur des données de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) et publiée le 1er mars dans le Lancet Regional Health Europe.
Un ralentissement de la diminution de la mortalité infantile peu exploré
Alors que dans certains pays à revenu élevé comme la Finlande, l’Islande, la Slovénie ou encore le Japon, le taux de mortalité infantile n’a cessé de diminuer depuis la Seconde guerre mondiale, en France, la dynamique de décroissance marque le pas depuis plusieurs années déjà. De fait, entre 1989 et 2017, le pays a été relégué de la 7e à la 25e place du classement mondial des États présentant le plus bas taux de décès d'enfants de moins d’un an, déplorent les auteurs du présent travail.
Malgré cette tendance négative, aucune analyse approfondie de l’évolution récente de cet indicateur clé n’a été conduite dans l'Hexagone. Un manque de données qui « empêche la priorisation (de la mortalité infantile) parmi les problèmes de santé publique, l'identification des principaux moteurs de la tendance et (surtout) l’élaboration de plans correctifs » pour atteindre l’objectif d’élimination de tous les décès d'enfants évitables d’ici à 2030 fixé par les Nations Unies, soulignent les auteurs.
Dans ce contexte, ces chercheurs de l’Inserm, de l’Université de Paris, de l’AP-HP et du CHU de Nantes ont mené une analyse statistique « poussée » de la situation. Ils se sont penchés sur des données d’état civil des enfants de moins d’un an enregistrées par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) entre 2001 et 2019.
Une réelle tendance à la hausse amorcée en 2012
Résultat : depuis 2001, la mortalité infantile n’a pas seulement cessé de baisser, elle a également recommencé d’augmenter. En effet, après une chute franche du taux de décès des enfants de moins d'un an jusqu’à 2005, cette dynamique de décroissance a fortement ralenti pendant 7 ans, et s’est même véritablement inversée à partir de 2012. Autrement dit, à partir de cette année-là « une augmentation significative du taux de mortalité infantile a été observée », résume l’Inserm. Si bien que l’indicateur est passé de 3.32 pour 1000 naissances vivantes en 2012 à 3.56 décès pour 1 000 en 2019, soit un rebond de 7 %.
Une tendance à la hausse qui apparaît bien réelle, estime l'Inserm, « des analyses de sensibilité (ayant) montré que (ces résultats) n’étaient pas liés à la modification des pratiques d’état-civil, ni à la modification des pratiques médicales pour la prise en charge des nouveau-nés atteints d’affections graves ».
Et si l’objectif des auteurs n’était pas d’identifier d’emblée les causes de cette augmentation – les données d’état civil ne renseignant pas sur les principaux facteurs de risques de décès infantile (âge gestationnel et poids à la naissance, présence d’une malformation congénitale grave, etc.) –, certaines hypothèses sont avancées. Car cette recrudescence des décès n’affecte pas de façon similaire tous les enfants de moins d’un an.
Des difficultés socio-économiques en cause ?
De fait, les enfants de sexe masculin – connus pour être plus sensibles aux facteurs de stress ambiant et à la prématurité que les filles – sont particulièrement concernés.
Par aileurs, la première de vie semble la plus critique. Or les facteurs de risque de décès néonatal précoce dont la prévalence pourrait augmenter en France, comme l’évoquent des données récentes sur la périnatalité, sont multiples : tabagisme pendant la grossesse, âge avancé et IMC élevé des mères, augmentation du taux de prématurité. De plus, « l'amélioration des soins pour les mères à haut risque de complications de grossesse peut conduire à la prévention des mortinaissances mais aussi à un report de ces décès en période néonatale », notent aussi les auteurs.
Des facteurs socio-économiques pourraient également être en cause, diverses études ayant déjà montré un lien entre fortes inégalités et mortalité infantile. Or « le taux de pauvreté des enfants en France a récemment affiché une tendance alarmante à la hausse », rappellent les auteurs. Cela pourrait d’ailleurs expliquer pourquoi l’Angleterre se trouverait dans une situation comparable à la France ; Outre-Manche, « le taux de mortalité infantile progresse fortement (et en particulier) dans les zones les plus défavorisées », rapportent les auteurs.
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