Faut-il évoquer une consommation de cannabis face à des étudiants rapportant des plaintes de sommeil ? Sans répondre précisément à cette question, une vaste étude observationnelle française publiée ce mois de février dans la revue Psychiatry Research conclut du moins à une augmentation de 200 % du risque d’insomnie chez les étudiants consommateurs quotidiens de cannabis.
Comme le rappelle l’Inserm dans un communiqué, en France, les étudiants apparaissent particulièrement touchés par les troubles du sommeil. Ainsi « 55 % des étudiants auraient des perturbations de leur sommeil, et 19 % d’entre eux souffriraient d’insomnie », avec un impact potentiellement délétère non seulement sur leur parcours universitaire mais aussi sur leur santé mentale et physique, souligne l’instance.
Parallèlement, diverses investigations ont déjà pointé un potentiel rôle de la consommation du cannabis dans divers troubles du sommeil. Cependant, peu de travaux se sont penchés sur ces liens potentiels entre cannabis et altération du sommeil chez les étudiants, déplorent les auteurs de la présente étude. Pourtant, « le niveau d’usage (de cette drogue) en France est particulièrement élevé chez les jeunes », relève l’Inserm. Selon le baromètre de Santé publique France, repris par l’OFDT, près de 14 % des 18-25 ans déclarent consommer du cannabis tous les mois, et près 4 % tous les jours.
Une association démontrée entre consommation de cannabis et troubles du sommeil
Dans ce contexte, des chercheurs de l’Inserm et du CHU de Bordeaux ont conduit « pour la première fois (…) une analyse approfondie de l’association entre la consommation de cannabis et les troubles du sommeil » dans ce public. Pour ce faire, ils se sont rapprochés de près de 14 800 étudiants universitaires de la cohorte i-Share– poretant sur la santé générale des étudiants. Ils ont soumis ce large échantillon de jeunes adultes à un auto-questionnaire en ligne portant à la fois sur leur consommation de cannabis (« quotidienne, hebdomadaire, mensuelle, ou rare/jamais », précise l’étude) et sur leur sommeil (en explorant notamment quatre types de plaintes : « l’insomnie, la somnolence (diurne), une mauvaise qualité de sommeil et la privation de sommeil », détaillent les auteurs).
Résultat : « cette étude (confirme) l’existence d’une association entre la consommation de cannabis et les troubles du sommeil (…) chez les étudiants », conclut l’Inserm. Après ajustement, « la probabilité de présenter une insomnie était significativement plus élevée de 45 % chez les consommateurs de cannabis (soit plus de 25 % des étudiants ndlr) en comparaison aux non consommateurs », détaillent les auteurs de l’étude. Un chiffre qui augmentait avec la fréquence d’utilisation, « atteignant une probabilité deux fois plus élevée d'insomnie chez les utilisateurs quotidiens (soit 1,5 % de l’échantillons ndlr) par rapport aux utilisateurs rares ou aux non utilisateurs », ajoutent-ils.
Pas de lien de causalité clairement démontré
« Des associations similaires entre usage du cannabis et les plaintes de sommeil autres que l'insomnie ont aussi été montrées », indiquent par ailleurs les auteurs. Et ce, alors que la prévalence de ces plaintes apparaissait sans surprise élevée dans l’échantillon – plus de 18 % des participants déclarant une hypersomnolence diurne, plus de 22 % une mauvaise qualité de sommeil, et plus de 52 % une privation de sommeil.
Toutefois, « la causalité (entre consommation de cannabis et mauvais sommeil) ne (peut) pas être affirmée avec certitude », reconnaît Christope Tzourio, dernier auteur de l’étude. Néanmoins, le chercheur plaide en faveur d’une « multiplication des messages de santé publique pour faire de la prévention auprès des étudiants ».
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