Rhume et vasoconstricteurs oraux : l'ANSM réitère son alerte, contre l'avis d'un comité européen

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Publié le 04/12/2023

Crédit photo : GARO/PHANIE

L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) persiste et signe, en dépit d'une opinion divergente d'un comité de l'Agence européenne du médicament : en cas de rhume, il faut éviter les formes orales des médicaments vasoconstricteurs à base de pseudo-éphédrine.

Une position « fondée sur la persistance des risques (accidents vasculaires cérébraux, infarctus du myocarde, etc.) et l’apparition de nouveaux risques tels que les syndromes d'encéphalopathie réversible postérieure (PRES) et les syndromes de vasoconstriction cérébrale réversible (RCVS) rapportés sans aucun antécédent médical notable ni facteur de risque, malgré les mesures de réduction de risque déjà existantes en France », argumente l'agence française, ce 1er décembre.

La pseudo-éphédrine est un stimulant souvent utilisé comme décongestionnant en cas de rhume ou d'allergies. Les médicaments en contenant sont disponibles au sein de l'Union Européenne sous diverses marques commerciales : Actifed, Aspirin Complex, Clarinase, Humex Rhume, Nurofen Cold and Flu, ou encore Aerinaze.

Des contre-indications supplémentaires, selon le PRAC

Le comité pour l'évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) de l'Agence européenne des médicaments (EMA), saisi par l'ANSM en février dernier, a introduit l'ajout de contre-indications et mises en garde dans les notices et résumés des caractéristiques du produit (RCP) de ces médicaments.

Ainsi, ces produits contenant de la pseudo-éphédrine ne doivent pas être utilisés chez les patients souffrant d’hypertension artérielle sévère ou non contrôlée (non traitée ou résistante au traitement), ou d’insuffisance rénale aiguë ou chronique sévère, indique l'EMA sur son site internet.

Et le PRAC d'ajouter : « Les professionnels de la santé doivent conseiller aux patients d’arrêter immédiatement d’utiliser ces médicaments et de se faire soigner s’ils développent des symptômes de PRES ou de RCVS, tels que des maux de tête sévères d’apparition soudaine, des nausées, des vomissements, de la confusion, des convulsions et des troubles visuels. »

Une prise en compte insuffisante des effets indésirables, selon l'ANSM

Le PRAC « ne prend pas suffisamment en compte la gravité des effets indésirables auxquels les patients sont inutilement exposés pour soulager un symptôme bénin qui bénéficie d'alternatives sûres », a réagi l'ANSM, rappelant qu'une rhinopharyngite bénigne d’origine virale guérit spontanément en 7 à 10 jours. Et de préconiser des « gestes simples » : humidifier le nez avec du sérum physiologique, dormir la tête surélevée, s'hydrater ou encore maintenir une atmosphère fraîche (18-20 °C) et aérer régulièrement les pièces.

L'agence réitère donc sa recommandation exprimée en octobre, conjointement avec le Collège de la médecine générale, le Conseil national professionnel d’oto-rhino-laryngologie, l’Ordre national des pharmaciens et les syndicats de pharmaciens d’officine, de ne pas utiliser les formes orales des médicaments vasoconstricteurs pour soulager les symptômes du rhume, soulignant que le risque de PRES et de RCVS s’ajoute aux risques graves déjà identifiés tels que des accidents vasculaires cérébraux et des infarctus.

Une position soutenue par la revue spécialisée Prescrire qui exhorte l'EMA à « aller plus loin que les propositions du PRAC, insuffisantes pour protéger les patients, en demandant le retrait de la pseudo-éphédrine de tous les médicaments qui en contiennent ».

Le comité scientifique (CHMP) de l'EMA va examiner dans les prochains mois la recommandation formulée par le PRAC afin de statuer sur le nouveau rapport bénéfice/risque de ces médicaments. Il transmettra son avis à la Commission européenne pour décision.


Source : lequotidiendumedecin.fr