Le sida fait de la résistance… Alors que pour l’hépatite C, les choses sont allées très vite et que désormais l’éradication du virus semble à portée de main, pour le VIH, la donne paraît plus compliquée. En témoignent les résultats en demi-teinte de plusieurs études présentées lors de la 21ème CROI (Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes, Boston 3 - 6 Mars).
Purger les réservoirs, un concept illusoire ?
Ces dernières années, plusieurs travaux avaient pourtant laissé entrevoir la possibilité d’éradication du sida. Avec notamment l’espoir de pouvoir venir « purger » les cellules réservoir du VIH pour en débarrasser définitivement le patient séropositif. Plusieurs molécules –dont certaines issues de l’arsenal thérapeutique oncologique - avaient été testées dans ce sens avec des résultats de recherche fondamentale plutôt encourageants. Mais la mariée était trop belle, et les nouveaux travaux conduits avec ces molécules et présentés à Boston ont tous montré qu’en pratique « cela ne fonctionne pas » résume le Pr Brigitte Autran (Laboratoire d’Immunologie Cellulaire et Tissulaire, Inserm U945 et Hôpital Pitié Salpêtrière, AP-HP, Paris). En d’autres termes, « aucune des stratégies testées ne permet de purger le réservoir ».
La rémission plus réaliste
Les stratégies visant la rémission, voire la guérison fonctionnelle, semblent plus réalistes. Dans ce cas, l’idée n’est plus de s’attaquer au réservoir et de purger l’organisme de toute trace du VIH, mais plutôt de permettre le contrôle du virus par le système immunitaire.
A ce titre, « il y a une confirmation importante que le traitement instauré très précocement - dans les premières heures ou les premiers jours suivant la contamination - apporte de réels bénéfices en permettant sinon la guérison du moins la rémission pour certains patients », indique le Pr Autran.
Le fameux « Mississipi Baby » en est l’illustration la plus emblématique. Né infecté (d’une mère HIV+ mais dont la séropositivité était restée ignorée jusqu’à l’accouchement), ce nourrisson avait été traité par trithérapie de façon très précoce, moins de 30 heures après sa venue au monde. Cette stratégie avait permis de négativer la charge virale de l’enfant rapidement et durablement, et ce même après l’arrêt du traitement à l’âge de 18 mois. Avec toutefois la persistance de traces génétiques du virus faisant parler de « guérison fonctionnelle ».
Un second cas potentiellement similaire a été rapporté à Boston. Là encore, l’enfant né d’une mère HIV + non traitée, a été placé sous trithérapie dans les heures suivant la naissance. Et là encore, le traitement précoce a été concluant avec une charge virale indétectable dès le 6ème jour. Depuis, la trithérapie a été poursuivie et à l’âge de 11 mois la charge virale était toujours indétectable. « A ce stade, nous ne parlons pas de guérison mais de rémission » a indiqué le Dr Yvonne Bryson (Los Angeles), tout en se montrant plutôt optimiste.
En dehors de ces deux cas exceptionnels, le traitement ultra précoce a aussi été évalué chez l’adulte. En 2012, l’étude Visconti, montrait pour la première fois qu’une trithérapie précoce, instaurée dès le stade de primo infection puis arrêtée après 2 ans de traitement, permettait des rémissions de longue durée chez près de 12 à 15% des patients.
Plusieurs travaux présentés à Boston, sont venus nuancer ces résultats, comme l’étude française Optiprim. Cette étude consistait à traiter très précocement les patients dès le stade de primo infection, avec, pour une partie d’entre eux, un traitement antirétroviral intensifié reposant sur une pentathérapie au lieu de la trithérapie classique.
Au niveau biologique, les résultats confirment l’intérêt du traitement précoce qui permet de protéger les cellules clefs du système immunitaire qu’on appelle les cellules mémoires centrales. Mais, au niveau clinique, 6 mois après l’arrêt du traitement, la majorité des patients ont eu un rebond viral et ont repris leur traitement. Une rémission durable a toutefois été obtenue chez un patient, avec, 18 mois après l’interruption thérapeutique, un contrôle persistant de la réplication virale, à l’image des patients de la cohorte Visconti (ou « patients contrôleurs après traitement »). « 1 sur 90, c’est bien, mais ce n’est pas beaucoup, » commente le Pr Autran pour qui cette étude montre qu’un « traitement précoce de 2 ans n’est pas probablement pas suffisant ».
Retour à la recherche fondamentale
Par ailleurs dans ce travail, la pentathérapie n’a pas fait pas mieux que la trithérapie. Ainsi, « même l’intensification thérapeutique ne permet pas de réduire le niveaux des
[[asset:image:926 {"mode":"small","align":"right","field_asset_image_copyright":["TIM VERNON\/SPL\/PHANIE"],"field_asset_image_description":[]}]]réservoirs viraux du VIH » analyse le Pr Autran. Pour autant « pas question de jeter le bébé avec l’eau du bain » estime la chercheuse, pour qui il faut clairement continuer à travailler sur ces questions de réservoir et d’éradication mais en repartant sur de nouvelles bases. « La conclusion de ces études, c’est « back to the basic study », c’est-à-dire retourner à la recherche fondamentale pour mieux comprendre les mécanismes moléculaires de persistance des réservoirs afin de définir de nouvelles cibles thérapeutiques ».
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