Parmi les mesures portées par la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD) dans le cadre de la stratégie décennale sur les soins palliatifs et des débats parlementaires autour du projet de loi sur la fin de vie, deux mesures avaient été actées : la pérennisation des structures de douleur chronique (SDC) et la mise en place de plateformes interventionnelles dans chaque région.
« À travers la difficile question de la fin de vie, les pouvoirs publics ont choisi d’adresser le grand défi de la prise en charge de la douleur », se félicitait le Pr Éric Serra, psychiatre et médecin de la douleur, vice-président de la SFETD, lors d’une conférence de presse le 6 juin. La société savante a été « entendue » sur l’amélioration de la prise en charge en fin de vie mais aussi « tout au long de la vie », a-t-il poursuivi. La SFETD voyait alors l’examen par le Parlement du projet de loi sur la fin de vie comme une opportunité « unique » d’améliorer l’accès aux soins des patients souffrant de douleurs réfractaires, particulièrement en cancérologie.
Soulager les douleurs réfractaires
Parmi les patients à un stade avancé, ce type de douleurs est « la première cause de demande d’euthanasie », estime le Dr Denis Dupoiron, anesthésiste-réanimateur, chef du département douleur de l’Institut de cancérologie de l’ouest à Angers. L’objectif est que chaque patient faisant une demande d’aide à mourir pour des douleurs insupportables ait accès à l’expertise des SDC.
De nouvelles techniques antalgiques sont disponibles, en particulier les injections intrathécales. Mais, cette technique, validée par la Haute Autorité de santé (HAS), réclame une grande technicité, notamment pour la mise en place de la pompe. « Peu de centres sont capables de le faire », souligne le Dr Dupoiron.
Pour diffuser ces techniques innovantes et former les professionnels, la SFETD veut déployer des plateformes interventionnelles, associant dans chaque région l’ensemble des soignants concernés par la prise en charge des douleurs réfractaires, des pharmaciens aux infirmiers, en passant par les médecins. « Environ 10 % des patients atteints de cancer » pourraient bénéficier du déploiement de ces structures.
Deux plateformes sont déjà actives : en Pays de la Loire et en Auvergne-Rhône-Alpes (plateforme Itara). Un financement, « modeste » selon le Pr Serra, a été accordé par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) pour développer une structure nationale chargée d’identifier les acteurs locaux à engager dans les plateformes régionales.
Des infirmières expertes en appui de la prise en charge
En parallèle, la SFETD avait obtenu la pérennisation des SDC. Au nombre de 276 sur le territoire, ces structures ont vocation à prendre en charge les 30 % des Français qui souffrent de douleurs chroniques. « Des incitations à les développer seront mises en place, notamment afin d’en créer 15 en cancérologie et 12 pour les mineurs », indique la SFETD.
Entre 5 à 7 % des enfants souffrent de douleurs chroniques. Ces douleurs s’expriment « souvent chez un jeune qui va mal », explique le Dr Julien Ngo, pédiatre, responsable de la SDC de l’enfant et de l’adolescent du centre hospitalier intercommunal de Créteil, secrétaire général de la SFETD. La création d’une structure pédiatrique spécialisée par région « serait une grande victoire » pour répondre aux enjeux de formation, de recherche et de coordination des acteurs au niveau local, poursuit-il.
Dans le cadre du renforcement des SDC, la SFETD participe à l’élaboration d’un protocole de coopération national pour la prise en charge des patients avec une douleur chronique par des infirmiers « experts douleur » en coopération avec le médecin. Les enjeux sont multiples : optimiser les parcours, réduire les délais de prise en charge et améliorer le suivi.
En attendant la publication d’un référentiel par la DGOS, prévue pour 2025-2026, 12 dérogations sont sur la table pour permettre un partage des missions entre médecins et infirmiers. « C’est en cours de validation par la HAS et les conseils nationaux professionnels (CNP) concernés », indique Karine Constans, infirmières ressource douleur au CH Simone Veil de Beauvais, trésorière de la SFETD.
Malgré l’avancée des travaux, ces engagements sont suspendus. La dissolution de l’Assemblée nationale annoncée par le président Emmanuel Macron dans la foulée des résultats des élections européennes, ce 9 juin, a d’ores et déjà mis fin à l’examen du projet de loi sur la fin de vie. Et la perspective d’une nouvelle majorité rend incertain tout pronostic sur l’avenir des engagements pris par le gouvernement actuel.
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