Depuis le 20 mars, la rue Mignon dans le 6e arrondissement de Paris ressemble à un laboratoire géant à ciel ouvert.
Dans cette voie de 50 mètres, plus un cm n'est libre, ou presque. Bidons bleus entreposés par dizaines, sans ou avec étiquette « éthanol surfin 96 % », tonnelles blanches abritant des palettes empaquetées, camions portes arrière ouvertes sans oublier une quinzaine de personnes affairées, vêtues de blouses blanches, masques, charlottes, gants et parfois visières.
Sur place, on fabrique des solutions hydroalcooliques, produit devenu rare depuis l'épidémie de Covid-19. Fin février, Fabien Bruno, le pharmacien responsable de l’officine Delpech, à l'initiative de ce projet, constate la forte demande. La pharmacie est rapidement dépassée. « Très vite, nous avons eu un manque de place et nous avons été pris dans un tourbillon », témoigne le pharmacien au « Quotidien ».
Mi-mars, le gouvernement encadre les prix de vente et la préparation de produits hydroalcooliques directement par les pharmacies ce qui ouvre les portes d'une production à grande échelle. Les équipes s'approprient la rue Mignon, avec l'autorisation de la mairie de Paris et de la Préfecture de police. « Nous nous sommes lancés et avons passé de grandes commandes, de 12 000 à 30 000 litres d'alcool », confie Sébastien Bertin, responsable du préparatoire extérieur et préparateur en pharmacie.
Flux tendu
Les solutions hydroalcooliques se composent principalement d'alcool à 96 degrés. Les équipes — pharmaciens, préparateurs et bénévoles — y ajoutent de la glycérine, de l'eau oxygénée et purifiée. L'ensemble est mélangé dans des cuves rectangulaires de 1 000 litres pendant 30 minutes. Lorsque la solution est prête, elle passe au stade du conditionnement. Deux personnes transvasent le nectar dans des sachets fins et transparents d'environ 1 litre, eux-mêmes placés dans des emballages. Parfois des cubis de rosé ou de vin rouge « parce qu'on fait avec ce qu'on peut », glisse le responsable du préparatoire.
Il faudra deux heures encore pour écouler les 1 000 litres de solution. Début avril, les équipes produisaient environ 10 000 litres par jour, selon le pharmacien responsable. Mais même à cette cadence, les stocks sont rares. « Il restera peut-être une ou deux palettes en fin de journée », jauge-t-il. « Nous sommes en flux tendu ».
Effort national
Ce chantier approvisionne principalement la communauté soignante : pharmacies, établissements et médecins libéraux mais aussi les forces de l'ordre, le SAMU social, les fédérations de boucherie ou d'autres commerces alimentaires. En cet après-midi, six pharmaciens font la queue, un binôme est même venu du Loiret. Et depuis le 1er avril, des livraisons vers les officines sont prévues.
Le chantier, encore inimaginable il y a quelques semaines, reste une fierté pour l'équipe. « Nous participons à l'effort national, assure Fabien Bruno. On ajoute une pierre à l'édifice et on soutient les forces de première ligne dont les médecins, les EHPAD, les paramédicaux pour qu'ils aient de quoi combattre. »
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