Le Dr Hubert Englebert n'a-t-il pas été assez méritant pour recevoir la Légion d’honneur ? Le médecin gériatre se pose aujourd’hui la question, un peu plus d’un an après avoir été un acteur décisif, estime-t-il, pour préserver du Covid-19 les résidents de l’EHPAD du Castel Blanc de Masevaux (Haut-Rhin) où il exerce en tant que médecin-chef.
En mars 2020, sa région est touchée de plein fouet par l’épidémie de SARS-CoV-2. Les médecins découvrent ce nouveau coronavirus dont ils ne savent presque rien. À partir d’observations de terrain, le Dr Englebert fait rapidement le lien entre Covid et embolie pulmonaire. Dès le mois de mars, il administre un traitement d’anticoagulants et d’antibiotiques aux résidents de son EHPAD atteints du Covid.
Intuition, expérience… toujours est-il que sur 45 patients touchés par la maladie (25 cas positifs, 20 cas suspects), seulement trois décéderont du Covid-19 durant la période de 7 semaines où l’épidémie sévit dans l’établissement qui compte 120 lits. Pour le Dr Englebert, son traitement a sans aucun doute limité les décès.
Un flair confirmé par les études
Au mois d’avril, une étude publiée dans « Radiology » par l’équipe du Pr Éric Delabrousse, chef du pôle imagerie du CHRU de Besançon, confirme les liens entre embolie pulmonaire et infection au SARS-CoV-2. Ces conclusions le conduisent à recommander la prescription d’anticoagulants de type Héparine pour contrer le risque de thrombose. Plusieurs semaines après le Dr Englebert, souligne ce dernier.
Le Pr Delabrousse recevra la Légion d’honneur au mois de janvier dernier pour ses travaux décisifs dans la lutte contre le Covid, qui ont fait école. « Depuis la deuxième phase de l’épidémie, tous les patients graves pris en charge en profitent », expliquait le professeur à l’« Est Républicain » au mois de janvier dernier.
« La médaille oubliée »
Le Dr Englebert, lui, attend toujours un signe de reconnaissance de la Nation pour son engagement décisif en début d’épidémie. « Je n’ai pas besoin d’une médaille pour faire mon travail, confie au Quotidien le praticien aujourd’hui âgé de 60 ans. Mais tout de même, je trouve qu’il y a un manque de considération pour les "petites mains", les médecins de terrain. Ce n’est pas très encourageant pour les jeunes qui voudraient embrasser la carrière. »
Il regrette que la prise d’initiative ne soit pas récompensée alors que nombre ses confrères et lui-même ont été livrés à eux-mêmes face à l’épidémie et à l’afflux de malades. « Quelle image envoie-t-on à nos jeunes générations de confrères isolés dans des EHPAD ou autres petites structures qui seront tentés de ne pas prendre de risques (et je parle de traitements connus) face à une maladie mortelle ? », s’interroge le Dr Englebert.
Le directeur de son EHPAD a également été promu Chevalier de la Légion d’honneur en janvier pour son implication dans la lutte contre le Covid dans son établissement. Ce dernier a rendu hommage au médecin dans le journal « L’Alsace » en évoquant son « admirable médecin-chef avec son fameux traitement novateur ».
Le Dr Englebert ne remet pas en cause cette distinction décernée à son directeur, mais elle le laisse un peu amer, même s’il se défend de toute acrimonie. Il attend toujours sa « médaille oubliée », comme il le dit lui-même. Dans une lettre qu’il a fait parvenir au « Quotidien », il en appelle aujourd’hui au président de la République pour que ce dernier rende hommage à la « médecine de première ligne ».
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