En juin 2020, alors que Doctolib explose grâce à l’essor des téléconsultations, la plateforme française annonce que toutes les données de santé qui transitent sur son site seront désormais « chiffrées de bout en bout et accessibles uniquement au patient et médecin ». Deux ans plus tard, la cellule d’investigation de Radio France a mené l’enquête et révélé le 20 mai que « certaines données médicales » présentes sur la plateforme « ne sont pas entièrement protégées ».
Après une rapide connexion à l’espace patient, les journalistes de Radio France – aidés par l’association de défense des droits et libertés sur internet La Quadrature du net – ont pu mettre à jour les données échangées entre l’ordinateur du patient et la start-up. Après inspection du code de la page, la cellule d’investigation révèle que les données liées aux rendez-vous médicaux – passés et futurs – n’étaient pas chiffrées et accessibles en « clair ».
Nom, spécialité du médecin, motifs…
« Nous voyons les détails de nos prochains rendez-vous : nom et prénom du patient, date et heure du rendez-vous, nom et spécialité du médecin et même le motif de la consultation », précise le média. Chez Doctolib, des salariés ont accès à ces détails médicaux, même si, « élément rassurant » pour Radio France, ces data sont tout de même chiffrées lors du transit entre le navigateur web du patient et l’entreprise. Autre élément rassurant : les comptes rendus médicaux, ordonnances, examens radio ou flux de téléconsultation, sont bien chiffrés de bout en bout. « Le chiffrement de bout en bout garantit que les données personnelles de santé des patients qui utilisent Doctolib ne sont accessibles qu’aux patients et à leurs professionnels de santé en toutes circonstances », affirmait Doctolib en juin 2020.
Aujourd'hui, en réponse à l’enquête publiée par Radio France, la licorne tricolore reconnaît que certains salariés habilités peuvent avoir accès aux détails des rendez-vous médicaux, ce qui ne remettrait pas en cause la sécurité. « À la demande d’un praticien ou d’un patient et sous leur supervision, un nombre restreint de salariés spécifiquement habilités doit pouvoir avoir accès à un nombre limité d’informations pour pouvoir porter assistance à nos utilisateurs », explique Doctolib.
Ce matin, @franceinter et @franceinfo ont mis en ligne un article laissant à penser que Doctolib ne chiffrerait pas les données de ses utilisateurs.
— Doctolib (@doctolib) May 20, 2022
C’est faux. Nous souhaitons donc y répondre point par point ? https://t.co/XhqSIU8SCb
Habilitations temporaires
La plateforme – propulsée en mars dernier à la tête des start-up hexagonales en termes de valorisation – souligne aussi que « ces salariés ont des habilitations temporaires, retirées à la fin de la résolution du problème de l’utilisateur ». « Tous les accès sont accordés, révoqués, audités, contrôlés et respectent un processus strict et centralisé », assure Doctolib.
Pour les rendez-vous médicaux, la société n’utilise donc par le chiffrement « de bout en bout », mais « au repos et en transit ». La start-up valorisée à 5,8 milliards d’euros, affirme que le chiffrement complet est en réalité impossible pour les prises de rendez-vous. « Pour une raison simple : garantir le bon fonctionnement de nos services, comme l’envoi de SMS de rappel », avance Doctolib.
Faille ?
Si Doctolib respecte les règlements français et européens en matière de données de santé, reste que des failles de sécurité – provenant notamment de l’intérieur de l’entreprise – ne sont pas exclues, avance Radio France. « Les intrusions extérieures sont également possibles, comme on l'a vu en juillet 2020, illustre le média. Les informations concernant 6 128 rendez-vous avaient été consultées illégalement par des pirates malveillants. » Doctolib avait, à l’époque, porté plainte.
Après deux burn-out, une chirurgienne décide de retourner la situation
La méthode de la Mutualité pour stopper 2,4 milliards d’euros de fraude sociale
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
À la mémoire de notre consœur et amie