Maintien de l'autonomie

Les avancées prometteuses mais encore timides de la télémédecine

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Publié le 04/02/2016
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En France, le nombre des plus de 65 ans passera de 12 à 35 millions d’ici à 2050. Cette réalité démographique laisse augurer une forte augmentation des dépenses de santé. Face à ce défi, le premier symposium aquitain des professionnels des seniors (SAPS), à Bordeaux, a engagé la réflexion sur deux pistes : maintenir un niveau de soins de qualité et développer une (silver) économie basée sur les besoins de cette population.

Permanence téléphonique

Le Pr Nathalie Salles, chef du pôle de gérontologie clinique au CHU de Bordeaux, a présenté plusieurs initiatives menées concrètes auprès des personnes âgées. Ainsi, la création d’une permanence téléphonique confiée à un gériatre, chargé de répondre aux questions des généralistes de ville, a permis d’éviter une entrée aux urgences dans 81,4 % des situations.

Au sein des EHPAD, le recours à une équipe spécialisée dans le traitement des plaies chroniques par téléconsultation est un succès. L’expérience entamée avec six EHPAD bordelais en comptera prochainement 25. « Nous avons aussi créé une équipe mobile (gériatre, pharmacien, ergothérapeute…) qui, depuis deux mois, est intervenue auprès de 80 personnes âgées dont 50 % n’avaient pas de généraliste et bien souvent pas de mutuelle », explique le Pr Salles.

Téléconsultations dans les déserts médicaux

La même démarche est initiée dans les campagnes, comme le décrit Nassera Rozenski, cadre de santé dans un EHPAD de Dordogne, en proie à la désertification médicale. « Lors du départ en retraite d’un généraliste qui suivait 19 de nos résidents, nous avons décidé le recours à la télémédecine, avec l’accord des généralistes du secteur complètement débordés, explique-t-elle. Depuis 2013, nous avons fait 50 téléconsultations avec des spécialistes en gériatrie, proposant souvent des solutions non médicales ou permettant d’alléger les traitements. »

Cet EHPAD devenu centre de ressources devrait bientôt proposer la télémédecine à l’ensemble de la population du secteur. «  La télémédecine renforce la coordination des soins et leur suivi, diminue les coûts, et booste les compétences de nos personnels  », estime Nassera Rozenski. 

Encore trop d'obstacles

« L’objectif est d’amener la télémédecine jusqu’au domicile du patient âgé, insiste le Pr Salles. Mais la France reste à la traîne. J’ai vu ma première expérience de télémédecine en Finlande en 1998. Ici, nous en parlons depuis 10 ans, mais rien ne se fait à part des expériences financées par les ARS ».

L’absence de tarification pérenne est un frein majeur. Même si un arrêté de 2014 fixe à 28 euros la téléconsultation et 14 euros la télé-expertise pour le traitement des plaies complexes, cela reste du domaine expérimental. D’autres obstacles demeurent : logiciels métiers ne communiquant pas entre eux, immobilisme réglementaire, modèles organisationnels obsolètes, réticences des médecins eux-mêmes…

Les participants au symposium ont conclu à la nécessité de «  casser les cloisons  » entre les professionnels, les secteurs public et privé, mais aussi dans les têtes.

 

De notre correspondant à BordeauxPatrice Jayat
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Source : Le Quotidien du médecin: 9468