Lors d'une séance de négociation ce jeudi, un projet d'avenant en bonne et due forme a été soumis par la CNAM aux syndicats (CSMF, MG France, SML, FMF et Le BLOC) en matière de télémédecine.
Le projet d'avenant, que « le Quotidien » s'est procuré, rappelle le cadre du recours à la téléconsultation et à la télé-expertise, les patients concernés (ALD, maladies rares, EHPAD, zones sous-denses, détenus dans un premier temps) et les conditions de réalisation de l'acte dans « un cadre sécurisé et confidentiel ». Nouveauté : le directeur de la CNAM Nicolas Revel fixe aujourd'hui l'objectif de l'ouverture de la téléconsultation et de la téléexpertise à l'ensemble des patients au 1er janvier 2020.
Des dérogations au parcours de soins concernent deux situations : patients résidant dans les zones sous-denses éligibles aux aides conventionnelles et patients nécessitant une intervention en urgence et pour lequel le médecin traitant n'est pas disponible dans les délais impartis. Dans ce cas, la téléconsultation est possible à condition de mettre en place une organisation coordonnée sur le territoire.
Deux niveaux de télé-expertise
Sur le volet tarifaire, la téléconsultation est valorisée « de manière identique aux consultations dites en présentiel auxquelles elles se substituent ». À cela s'ajoutent les majorations applicables selon la spécialité. Dans le cas où un médecin assiste le patient au moment de la téléconsultation, il pourra « facturer une consultation dans les conditions habituelles parallèlement à la facturation de la téléconsultation par le médecin téléconsultant ».
Côté télé-expertise, la rémunération varie en fonction de la fréquence (ponctuelle ou régulière) et du niveau de complexité. Le premier consiste en « un avis donné sur une question circonscrite, sans nécessité de réaliser une étude approfondie d‘une situation médicale ». L’avis de premier niveau correspond « à l’analyse de documents en nombre limité (photographie, résultat d’examen complémentaire isolé, données cliniques y compris pour aider à l’orientation de la prescription, etc.) ».
Sur demande des syndicats, la CNAM énumère les situations pathologiques qui relèvent d'une télé-expertise de ce premier niveau : interprétation d’un cliché de tympan ou de pathologie amygdalienne, lecture d’une rétinographie ou encore étude d’une spirométrie en pneumologie. Cette liste a vocation à évoluer.
Quant au second niveau de télé-expertise, il consiste en un avis circonstancié donné en réponse à une situation médicale complexe après étude approfondie de plusieurs types de documents (suivi d'une plaie chronique en état d'aggravation, adaptation d'un traitement antiépileptique, bilan préchimiothérapie etc). Là encore, « la liste est évolutive ».
Les télé-expertises de niveau 1 « simple » (de manière ponctuelle ou répétée) sont facturées 12 euros et limitée à quatre actes par an, par médecin et par patient. Celles du niveau 2 sont effectuées de manière ponctuelle uniquement et facturées 20 euros. Elles seront limitées à deux actes par an, par médecin et par patient. « L'ensemble de ces actes de télé-expertise ne peut pas faire l'objet de dépassements d'honoraires », peut-on lire dans le projet d'avenant.
Du mieux pour le médecin requérant
Pour le médecin requérant, la CNAM a fait une nouvelle proposition. Le travail de coordination du médecin sollicitant son confrère sera valorisé forfaitairement dès la dixième demande quel que soit le niveau.
Entre 10 et 30 demandes par an, le médecin touchera un forfait de 75 euros ; entre 31 et 60 le forfait est de 170 euros ; entre 61 et 100 télé-expertises requises le forfait s'élève à 300 euros. Enfin au-delà de 100 télé-expertises requises, le forfait passe à 375 euros.
Un nouvel indicateur « télémédecine » sera intégré au forfait structure. Il sera affecté de 50 points à partir de 2019, soit 350 euros. Il valorisera « l'implication du médecin dans des démarches de prise en charge des patients par télémédecine en participant aux frais d'équipements générés par cette activité : équipement pour vidéotransmission sécurisée nécessaire à la réalisation de la téléconsultation, y compris via les abonnements aux plateformes de télémédecine, etc. », lit-on dans le projet.
Financement insuffisant
Malgré ce coup de pouce financier pour la télé-expertise, l'avenant a goût de trop peu pour les syndicats.
Le SML demande à la CNAM de rendre le dispositif plus incitatif en permettant notamment aux médecins téléconsultants de coter APC (48 euros) « comme c'est le cas aujourd'hui dans le parcours de soins ». « Pas raison de faire de la télémédecine une médecine au rabais », juge-t-il.
La CSMF continue de réclamer une rémunération à l'acte pour le praticien requérant dans le cadre de la télé-expertise (plutôt qu'un système forfaitaire). « Les tarifs proposés tant pour le médecin requis pour le médecin requérant ne permettront pas le développement du dispositif », souligne la CSMF.
La FMF est sur la même ligne. « Un avis de télé-expertise doit être au minimum une consultation. Le forfait structure proposé est aussi insuffisant », réagit le Dr Jean-Paul Hamon. Le président de la FMF rappelle qu'une valise de télémédecine coûte environ 3 000 euros et un chariot de télémédecine 30 000 euros.
Pour MG France, « le compte n'y est pas financièrement. Ce n'est pas attractif et on est inquiet sur la capacité des médecins à s'engager dans la télémédecine ». Le Dr Gilles Urbejtel, trésorier, indique que son syndicat refuse toute rémunération par palier. « Nous souhaitons un forfait de base de 50 à 100 euros environ plus une rémunération à l'acte de 5 euros pour chaque avis suivant », dit-il.
Une nouvelle séance de négociation sur la télémédecine est prévue le 18 avril.
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