Les députés ont adopté ce 22 octobre un nouvel encadrement de l'isolement et de la contention, en votant l'article 28 du Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
Ce dernier reprend dans les grandes lignes le dispositif élaboré l'an passé dans le PLFSS de 2021, en le rendant « plus robuste, plus efficace et plus simple pour les médecins », selon les mots du rapporteur général Thomas Mesnier (LREM). Ce dernier cadre avait été censuré en juin dernier - un mois après la publication des décrets ! - par le Conseil constitutionnel estimant que la loi ne prévoyait pas un contrôle systématique des mesures d'isolement et de contention par le juge des libertés et de la détention (JLD).
La nouvelle mouture ne touche pas aux durées limites des mesures d'isolement (12 heures) et de contention (6 heures), définies suivant les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), ni à la possibilité pour le médecin de les renouveler respectivement jusqu'à 48 et 24 heures. Dans ce cas, le directeur d'établissement doit informer sans délai le JLD, et le médecin, les proches du patient.
Saisie du JLD avant 72 heures d'isolement et 48 heures de contention
La nouveauté réside en ce que le directeur de l’établissement doit désormais saisir le JLD avant l’expiration de la 72e heure d’isolement ou de la 48e heure de contention, si l’état de santé du patient l'exige. Le JLD a alors 24 heures pour rendre son avis (mainlevée ou maintien). Dans le cas où il se prononce pour le maintien de la mesure, un nouveau cycle s'enclenche, qui aboutit à une deuxième saisine du JLD (si le patient est toujours isolé au bout de 72 heures supplémentaires, ou contenu au bout de 48 autres heures). Si un renouvellement de la mesure est encore nécessaire, une nouvelle période de 7 jours s'ouvre, et le JLD doit être saisi 24 heures avant l'expiration de ce délai. Ainsi de suite par période de 7 jours, si besoin.
Au moins une personne à informer
Dans l'hémicycle, les débats ont surtout porté sur la liste des personnes que les médecins doivent informer lors du renouvellement d'une mesure. L'article 28 prévoyait initialement que ce soit « les personnes mentionnées à l’article L. 3211‑12, dès lors qu’elles sont identifiées, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical », c'est-à-dire une dizaine de personnes possibles, des parents ou tuteurs, au procureur de la République en passant par le conjoint ou toute personne ayant formulé la demande de soins.
Les députés ont adopté l'amendement du député Thomas Mesnier qui prévoit l'information « d'au moins un membre de la famille ou d'une personne susceptible d’agir dans l’intérêt du patient, dès lors qu’une telle personne est identifiée ». « Cela restreint le champ des personnes dans une logique d'efficacité, afin que cela soit plus pratique pour les médecins qui doivent recueillir leurs contacts », a-t-il justifié, précisant que la notion de « personne de confiance » était englobée dans cette formulation.
Des psychiatres inquiets des contraintes administratives
Sur ce sujet, le Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH), les Associations des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire (ASPMP) et l'Union syndicale des magistrats (USM) avaient mis en garde (en amont de la discussion du PLFSS) contre les écueils de l'information des proches. Considérant que l'objet de cette information est la saisie du JLD, ces organismes la jugent inutiles (puisque le JLD est systématiquement informé et saisi), douloureuse, voire dangereuse (risque d'instrumentalisation dans un conflit familial).
Les psychiatres pointent par ailleurs une mauvaise articulation entre le contrôle du JLD 7 jours après la 2e décision de maintien et le contrôle de la mesure d'hospitalisation complète à 12 jours. Plus largement, ils s'inquiètent d'une multiplication et saisines du JLD et des contraintes administratives supplémentaires. « Dans la situation actuelle de tension proche de l'implosion tant dans les services hospitaliers que judiciaires, cette nouvelle procédure risque bien d'être la goutte d'eau qui va faire déborder le vase », écrivent le SPH, l'ASPMP, et l'USM. Enfin, sur la forme, ils fustigent à nouveau le traitement de cette réforme dans le PLFSS, et non dans une loi globale sur la psychiatrie.
Transition de genre : la Cpam du Bas-Rhin devant la justice
Plus de 3 700 décès en France liés à la chaleur en 2024, un bilan moins lourd que les deux étés précédents
Affaire Le Scouarnec : l'Ordre des médecins accusé une fois de plus de corporatisme
Procès Le Scouarnec : la Ciivise appelle à mettre fin aux « silences » qui permettent les crimes