Fin de l’exclusion permanente des HSH du don du sang

« Une avancée très forte, et une première étape », selon Olivier Véran

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Publié le 09/11/2015
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Dr OLivier Véran : Je suis satisfait : l’exclusion à vie des homosexuels, en raison de leur orientation sexuelle, était discriminatoire. Je recommandais dans mon rapport de lever l’interdiction du don de sang de la même façon pour les hétérosexuels et les homosexuels en tenant compte non de l’orientation sexuelle mais des pratiques, et d’imposer un délai de 4 mois après un rapport à risque (ce qui est déjà la norme pour les candidats éligibles, ndlr).

Cette option de 4 mois n’a pas été retenue mais elle pourra être mise en œuvre dans un second temps. L’ajournement de 12 mois après le dernier rapport HSH est une première étape.

Et c’est déjà une avancée très forte. Tous les ministres successifs de la Santé, de droite comme de gauche, ont promis depuis 2006 de lever l’interdiction à vie. Marisol Touraine est la première à franchir le pas.

Je salue d’ailleurs le travail de la direction générale de la santé qui a permis de trouver un consensus, avec les associations de donneurs, de receveurs, et les experts, sur un sujet qui subissait un véritable blocage.

Comprenez-vous l’émoi, voire l’indignation, qu’a soulevé l’ajournement de 12 mois après le dernier rapport HSH ?

Je comprends la frustration et l’incompréhension, mais il faut mettre de côté l’émotion dès lors qu’il n’y a plus de discrimination objective, et que les autorités s’accordent sur un équilibre garantissant la sécurité.

Dans le cas des produits sanguins labiles, il existe une brève fenêtre virologique au cours de laquelle un dépistage peut s’avérer faussement négatif. Comme l’utilisation des PSL est rapide, le risque de tomber dans cette fenêtre PEUT être légèrement plus élevé. Des études doivent lever ce doute.

Il faut rappeler que la distinction entre hétéro et homosexuel est abolie pour le plasma : toutes les personnes ayant eu un seul partenaire depuis au moins 4 mois pourront participer au don de sang. Des tests peuvent être faits à distance sur le plasma, congelable. Cela nous permettra de savoir s’il y a eu des dons contaminés, et le cas échéant dans quelles circonstances pour dans un second temps, revoir le critère pour les dons de PSL.

La France partait de loin. Un homme qui avait eu un rapport avec un homme dans sa jeunesse et depuis en couple avec femme et enfants, ne pouvait plus donner son sang. Désormais, malgré l’ajournement d’un an, on peut espérer 40 000 poches de sang supplémentaires par an. La France se hisse dans la fourchette haute des pays en matière de don du sang pour les couples de même sexe*.

Doit-on s’attendre à ce que les candidats mentent, sinon dissimulent davantage leur situation ?

Le questionnaire pré-don sera modifié en tenant compte des pratiques et non de la sexualité. Des études sociologiques doivent être lancées notamment parmi les candidats testés séropositifs : le savaient-ils ou non ? Pourquoi ont-ils caché des rapports à risques ? Aujourd’hui, on sait que certaines personnes ne répondent pas totalement au questionnaire. Avec des critères d’exclusion assouplis, non discriminatoires, et dont la pertinence est comprise, le taux de réponses correctes sera amélioré, j’en suis convaincu.

*Dans son rapport, le Dr Véran faisait état de pays ayant autorisé le don aux homosexuels à l’issue d’une période d’abstinence de 1 à 5 ans (Royaume-Uni, Canada), tandis que l’American Medical Association (AMA) juge non fondée scientifiquement l’interdiction à vie, et plaide pour un délai de 12 mois.
Propos recueillis par Coline Garré

Source : Le Quotidien du Médecin: 9448