LE QUOTIDIEN : - L’industrie pharmaceutique semble attaquée de toutes parts ces derniers temps, aussi bien par la presse magazine que par la télévision. Y voyez-vous un hasard ou une volonté délibérée ?
CHRISTIAN LAJOUX : - Nous sommes en train de revivre pour la énième fois des attaques contre l’industrie du médicament, en forme de véritable procès. Mais il faut regarder tout ça avec sérénité. Y a-t-il de nouveaux acteurs à charge dans ce procès ? La réponse est clairement non. Ces acteurs qui organisent un procès en sorcellerie contre l’industrie du médicament sont les mêmes depuis des décennies. Il y a un journal indépendant, et un ancien cadre de l’industrie du médicament. Il y a aussi un ancien professeur qui assurait avoir découvert le médicament miracle contre le Sida il y a quelques années. Bref, on retrouve à chaque fois les mêmes acteurs. Deuxième question : y a-t-il des arguments nouveaux ? Une fois encore, la réponse est non. Ce sont les mêmes procès d’intention et les mêmes caricatures, qui viennent du siècle dernier. On nous oppose toujours par exemple les cadeaux offerts autrefois aux médecins par l’industrie du médicament. Je rappelle que la loi anti-cadeaux remonte à 1994. Ces détracteurs utilisent des arguments éculés, et ne présentent aucun argument nouveau. Nous subissons simplement une nouvelle attaque qui, au passage, vise plus les autorités elles-mêmes que l’industrie du médicament, ce que je trouve aussi injuste que pour les médicaments.
Mais on n’a pas beaucoup entendu les autorités de santé dans ce débat…
Les autorités pourraient prendre fortement position sur la qualité du système qu’elles ont développé. Nous avons une des meilleures agences d’Europe, nous avons un comité économique des produits de santé (CEPS) qui fonctionne de façon plutôt lisible et claire. Il m’arrive d’émettre des critiques sur la Haute autorité de santé (HAS) mais malgré tout, elle fait avancer de nombreux dossiers, notamment en terme de qualité, sur la certification de la visite médicale et sur la mise en place de référentiels. Ce sont des éléments de modernité que l’on ne peut pas critiquer. Je ne suis pas non plus toujours d’accord avec la stratégie de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM), mais force est de constater qu’elle contribue à maints égards à développer des actions de prévention, et à rechercher l’efficience dans l’utilisation des ressources. Je peux être à la fois un acteur critique sur certains aspects de notre gouvernance, mais je considère que globalement, le système fonctionne bien, et que la qualité et l’intégrité de ses personnels ne peuvent pas être mises en doute.
Il reste plusieurs accusations, dont les conflits d’intérêt qui peuvent exister entre l’industrie pharmaceutique et les autorités de santé...
Les conflits d’intérêt sont un sujet que l’on doit aborder avec beaucoup de transparence. Mais il faut d’abord définir ce que c’est. Les gens qui travaillent avec l’industrie du médicament et qui ont un rôle d’évaluateur dans les agences, déclarent ce qui pourrait potentiellement constituer un conflit d’intérêt. Cette liste est publiée sur le site de l’AFSSAPS. Il est difficile, dans le monde où nous vivons, d’éviter que de grands experts et de grands spécialistes travaillent aussi avec les industriels pour développer les médicaments. Il vaut mieux développer des médicaments avec de grands experts qu’avec des mécaniciens, et il vaut mieux faire évaluer ces médicaments par des experts que par des mécaniciens ou des informaticiens. C’est une situation logique qu’il faut aborder dans sa complexité pour la faire évoluer sans rien perdre des compétences nécessaires.
Et pour la visite médicale ?
Pour la visite médicale, l’attaquer équivaut véritablement à tirer sur une ambulance, vu le contexte actuel. De plus, dire que les visiteurs médicaux seraient essentiellement des jeunes et jolies jeunes filles avec les sous-entendus faciles à imaginer, c’est du sexisme. Ces accusations sont scandaleuses et diffamatoires, et nous étudions la possibilité juridique de saisir la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité) car nous ne pouvons laisser dire ça. Les visiteurs médicaux se sentent déjà en difficulté dans le contexte actuel, ils se sentent parfois abandonnés par leur entreprise dans la mutation internationale et ils se sentent salis par ces assertions. Je vous rappelle que si les visiteurs médicaux ont bien évidemment une fonction commerciale que nous ne nions nullement, ils constituent également le vecteur par lequel remonte la moitié des informations de pharmacovigilance relatives aux médicaments. Je rappelle aussi qu’il s’agit d’une profession très encadrée : depuis 1994, les visiteurs sont diplômés d’état et ont un niveau de licence. Leur activité est encadrée par la charte signée par le LEEM et le CEPS, et depuis deux ou trois ans, le métier est certifié par des normes reconnues. Bref, le visiteur médical ne raconte pas n’importe quoi au médecin.
Quid de votre directeur général, Philippe Lamoureux, qui a exercé des responsabilités à l’agence du
médicament ?
Les attaques proférées contre lui déshonorent leurs auteurs. Les qualités, l’honnêteté et l’intégrité de Philippe Lamoureux ne sont ignorées de personne. Quand le LEEM lui a proposé de le rejoindre pour mettre ses compétences au service de la santé, Philippe l’a fait avec le souci de l’intérêt général. En mettant une personnalité aussi incontestable à un poste clé des entreprises du médicament, le LEEM donne clairement un message d’évolution de ses relations avec l’ensemble du monde de la santé.
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