Servier veut développer ces partenariats de R&D dans la durée, ce qui conduit par exemple à un programme de recherche très actif dans la maladie d’Alzheimer, un secteur aujourd’hui un peu délaissé, après de multiples déconvenues*.
Le laboratoire a choisi un modèle qui, après la mort de son fondateur, en avril 2014, le met à l’abri de fluctuations boursières. Le groupe de recherche est dirigé par une fondation sans capital (et, de ce fait incessible), ce qui permet de réinvestir 100 % des ressources au sein du groupe et au moins 25 % du chiffre d’affaires en R&D (3 000 collaborateurs sur les 21 400 du laboratoire) expliquent Emmanuel Canet (VP R&D) et Pascal Touchon (VP Coopération Scientifique).
À côté de ce facteur de continuité, Servier a entamé une importante mutation. D’une part, l’internationalisation du groupe est croissante (92 % des produits Servier sont vendus hors de France). D’autre part, il a profondément réorganisé sa R&D ; même si Servier conserve son effort de recherche interne (4 centres de recherche dont 3 en France, 19 centres internationaux de recherche thérapeutiques), la priorité est donnée aux partenariats et collaborations (plus de 250 contrats signés en quelques années), avec des groupes publics et privés.
Cinq axes thérapeutiques
Cinq grands axes thérapeutiques sont concernés : cardiologie, métabolisme (diabète de type 2), neuropsychiatrie, rhumatologie et cancérologie avec 18 molécules de développement clinique, dont 8 anticorps monoclonaux et une protéine recombinante. La moitié de ce portefeuille fait l’objet de partenariats et la cancérologie y occupe une place majeure (8 molécules sur 18). La neurologie arrive en seconde position : deux produits dans la maladie d’Alzheimer, un dans la SEP et un dans le post-AVC.
3 molécules sont en phase III : Pixuvri dans les lymphomes non hodgkiniens agressifs, une IL1ß et un analogue de GLP1 à très longue durée d’action.
Au-delà de ces données globales, Emmanuel Clanet et Pascal Touchon ont passé en revue plusieurs projets qui illustrent la philosophe de l’entreprise. Dans le projet BCL-2, en partenariat avec Novartis, portant sur des candidats médicaments issus de la recherche Servier et visant à agir sur l’apoptose, le point de départ est la recherche interne, effectuée au Centre de Croissy (Yvelines).
Le projet Servier-Geneuro vise au contraire à développer une molécule découverte et étudiée depuis de nombreuses années par un chercheur français et une start-up suisse, Geneuro. Ce médicament cible des rétrovirus endogènes réactivés chez de nombreux malades atteints de SEP ; un mécanisme d’action tout à fait original.
Dans les deux cas, Servier n’a pas hésité à miser sur des pistes nouvelles ou peu explorées, donc aléatoires. « Nous avons fait le choix du risque et du long terme, souligne Pascal Touchon car nous pensons que l’innovation vraie est à ce prix. » C’est le même état d’esprit qui a conduit Servier à investir dans la maladie d’Alzheimer (une molécule en phase pré-clinique et deux en phase clinique), secteur aujourd’hui un peu délaissé par l’industrie pharmaceutique, en partie parce que l’on y a enregistré plusieurs échecs à court terme.
Là encore, il faut savoir donner du temps au temps et ne pas avoir peur de tisser de nombreux partenariats, aussi bien pour élucider la physiopathologie que pour maîtriser les technologies nécessaires à tous les stades de développement d’un médicament.
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