La qualité des médicaments génériques, régulièrement évoquée, est mise en cause par de nombreuses voix dans l’affaire des lots de furosémide. Parmi les détracteurs, le Dr Sauveur Boukris, médecin généraliste et auteur du livre « Médicaments génériques, la grande arnaque », s’est livré au « Parisien » : « De façon générale, argumente-t-il, les coûts de fabrication des génériques sont inférieurs de 50 à 60 % à ceux de l’original. Quand vous diminuez fortement les coûts, vous ne pouvez pas prétendre à avoir le même niveau de sécurité ». L’argument est balayé par un haut responsable de l’industrie : « ce qui permet de diminuer les coûts pour un générique, c’est que le fabricant n’a pas à engager de dépenses de R&D, celles-ci ayant déjà été supportées par le fabricant du produit princeps de référence ». En revanche, la sécurité serait identique.
Cette source industrielle précise qu’un guide des bonnes pratiques de la fabrication des médicaments à usage humain énonce l’ensemble des process à respecter dans les chaînes de fabrication et de conditionnement, et a force de loi. « Ce guide s’applique aussi bien aux fabricants de princeps qu’aux génériqueurs. Il s’agit donc bien d’un accident de médicament et non de générique ».
Isabelle Adenot, présidente du conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP), est étonnée par la survenue de cet accident industriel. « Je n’ai jamais vu un rappel de lot pour un problème de ce type, assure-t-elle. Des incidents peuvent arriver, mais les contrôles sont tels que le problème est toujours décelé avant même que le médicament ne quitte le centre d’assemblage ». Les chaînes de fabrication des princeps et des génériques sont à mettre sur le même plan. « Les mêmes contrôles, les mêmes exigences s’appliquent aux unes et aux autres, rappelle-t-elle, c’est donc par hasard que c’est tombé sur un générique ».
Zones séparées.
Des règles strictes doivent être respectées. Quand une chaîne de fabrication passe d’un médicament à l’autre, on procède à un vide de chaîne. « La chaîne de production est complètement vidée de tout produit ou substance, insiste Isabelle Adenot. Pour s’assurer que le vide a été correctement fait, on utilise notamment des procédés de chromatographie. Ce sont des procédures très lourdes car il faut qu’il ne reste aucune trace des produits précédemment utilisés ». Enfin, la procédure oblige un industriel qui fabrique ou conditionne au même moment deux médicaments distincts à le faire dans des zones physiquement séparées.
Le Professeur François Chast, chef de service de pharmacie clinique du groupe hospitalier Cochin-Hôtel Dieu, ne croit pas non plus que la surveillance de la fabrication des génériques puisse être plus facilement prise en défaut que celle des princeps. « Si je connais bien les process de fabrication des médicaments, je ne connais pas particulièrement Teva et n’ai pas de liens avec eux. Mais l’usine d’assemblage de Sens est une très grosse implantation industrielle, où on conditionne des quantités très importantes de médicaments tous les mois. Qu’elle assemble des génériques ou des princeps est indifférent, il y a très peu de chances pour que le process soit pris en défaut, même si une erreur est toujours possible ».
En milieu de semaine, la piste de la malveillance restait plausible, sinon probable. « La répartition des comprimés de somnifère découverts dans les blisters de Furosémide n’est pas homogène, selon les boîtes, il y en a plus ou moins. La seule explication, c’est que dans la zone d’approvisionnement de la chaîne de conditionnement, il a été déposé par erreur ou par malveillance une fraction de comprimés qui n’aurait pas dû y être », souligne cet expert.
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