POUR LA CINQUIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE, le budget de la Sécurité sociale - examiné par les députés la semaine prochaine - met lourdement à contribution l’industrie du médicament. L’ardoise est même plus salée que d’habitude, avec des efforts de redressement directs supérieurs à 700 millions d’euros. Au menu : nouvelles taxes, baisses de prix, génériques, marges des grossistes, TFR, déremboursement des médicaments à SMR insuffisant ou encore renforcement de la maîtrise dite médicalisée. Il faut dire que le climat n’est guère favorable au secteur du médicament, déjà très marqué par l’affaire Mediator. Le mois dernier, la Cour des comptes stigmatisait encore les dépenses de médicaments « structurellement élevées » dans notre pays et la culture de prescription spécifique qui favorise « une forte consommation de médicaments nouveaux et chers ».
Stratégie économique.
C’est dans ce contexte que Le LEEM (Les Entreprises du Médicament) rend publique une étude commandée au BIPE (une société d’études économiques et de conseil en stratégie), qui tente de répondre à la question suivante : « Dans quelle mesure le médicament est-il un économiseur de coût ? »
Deux aspects du médicament sont analysés : les économies directes obtenues sur ce poste (liées à la régulation des prix) et celles permises par les complications, hospitalisations et arrêts de travail qu’il évite.
Certes, les dépenses de médicament croissent naturellement sous l’effet de la hausse démographique, du vieillissement de la population, de l’arrivée sur le marché de produits innovants plus chers, et du nombre croissant de patients en ALD à âge égal. Mais le BIPE a calculé parallèlement les économies et gains d’efficience liés aux baisses de prix, à la substitution générique, aux grands conditionnements, aux baisses de taux et à la maîtrise médicalisée. Ainsi, chaque année, entre 2005 et 2009, le BIPE évalue les économies réalisées à 3,4 % des dépenses de médicaments présentés au remboursement, et même à 4 % par an si l’on inclut l’année 2010. Quant à la maîtrise médicalisée (modération de la prescription, CAPI et autre paiement à la performance), le BIPE estime qu’elle a permis ou permettra d’engranger 0,5 % d’économies supplémentaires. Au final, l’évolution du marché remboursable reste positive mais très faible, à 1,6 % en moyenne sur les cinq dernières années, insiste le LEEM. « Au total, conclut l’étude citée par le LEEM, le poste médicament de la CNAM évolue très nettement moins vite que le reste des dépenses de soins de ville depuis 2006, ce qui reflète que le médicament a apporté l’immense majorité des économies en ambulatoire ». Les prélèvements spécifiques à l’industrie pharmaceutique « sont aussi des gains de productivité pour l’assurance-maladie », note le BIPE.
Il y a aussi les économies induites comme les coûts évités par le médicament. L’étude est moins étayée mais cite les traitements contre l’asthme qui, « bien contrôlés, évitent des consultations médicales et des coûts hospitaliers », ou les médicaments contre les pathologies cardio-vasculaires qui ont « un rôle dans la prévention des complications et dans les hospitalisations évitées ». Avec une mention spéciale pour la vaccination et les antibiotiques : « En ville et bien utilisés, indique l’étude, ils constituent une stratégie économique ».
Idées reçues.
Christian Lajoux, président du LEEM, revient au passage sur « une idée reçue tenace » qui fait des Français les plus gros consommateurs de médicaments d’Europe. Pour s’en défendre, le LEEM présente une étude de la CNAM de mars 2011, qui classe la France au deuxième rang des pays consommateurs de médicaments, à égalité avec l’Espagne et derrière le Royaume-Uni. Et qui met en évidence le fait que la France se caractérise désormais par la plus faible évolution des volumes de consommation : 0,5 % par an pour la France entre 2006 et 2009, contre 4,3 % pour l’Allemagne, 4,5 % pour l’Italie et 4,6 % pour l’Espagne...
L’offensive du LEEM ne tombe pas par hasard. Elle veut souligner l’importance d’asseoir toute décision sur des « faits avérés et des données objectives ». « Il est économiquement démontré que l’augmentation très modérée des dépenses de médicaments remboursables n’est pas imputable à la politique commerciale des industriels ni à une pression supposée des prescripteurs », tranche le syndicat. Il lance un avertissement aux députés : « La régulation du médicament ne continuera de fonctionner qu’à la condition de demeurer soutenable pour l’équilibre des entreprises, la préservation des emplois industriels et l’attractivité du territoire. Le médicament ne peut plus être considéré comme le pivot unique de la recherche de nouvelles économies ».
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