Comme les thiopurines, les antiTNFα sont associés à un risque de lymphome multiplié par 2 à 3 dans les maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI), révèle une étude de l'ANSM menée en collaboration avec l'AP-HP et publiée dans le « JAMA ». Le risque, bien que faible à l'échelle individuelle, serait même multiplié par 6 en cas de combinaison des deux traitements.
Ces résultats vont être portés à la connaissance de l'Agence européenne des médicaments (EMA) et seront largement diffusés auprès des sociétés savantes et de la HAS, indique l'ANSM, afin qu'ils soient pris en compte dans la stratégie de prise en charge thérapeutique des patients atteints de MICI.
L'intérêt du médicament n'est pas remis en cause
« Le risque est très augmenté en valeur relative mais l'événement est très rare en valeur absolue, tempère Rosemary Dray-Spira, chef du pôle épidémiologie des produits de santé de l'ANSM et auteure principale. Ces résultats ne remettent pas en cause l'intérêt du médicament dans ces maladies invalidantes, parfois très difficiles à prendre en charge. Les prescripteurs doivent avoir connaissance de ces nouveaux résultats ».
Si le risque de lymphome était suspecté pour les antiTNFα et mentionné dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP), il était difficile de faire la part des choses avec la thiopurine, elle-même associée à un risque de lymphome et prescrite dans les MICI. C'est donc pour la première fois qu'une étude confirme ce risque pour les antiTNFα. L'information était importante à avoir car les antiTNFα sont connus pour être associés à des effets indésirables potentiellement graves et que la prescription des antiTNFα, utilisés seuls ou en association, a fortement augmenté au cours de ces deux dernières décennies dans la rectocolite hémorragique et la maladie de Crohn.
Un risque qui s'ajoute à celui des thiopurines
C'est sur une large cohorte nationale de 189 289 patients atteints de MICI à partir des données du Système National d'Information Inter-Régimes de l'Assurance Maladie (SNIIRAM) que s'est basée l'équipe dirigée par Rosemary Dray-Spira (ANSM) et Mahmoud Zureik (ANSM) avec le Pr Franck Carbonnel, gastro-entérologue à l'hôpital Bicêtre (APHP). Comparé aux études antérieures, ce travail s'appuie ainsi sur un nombre bien plus élevé de patients traités par anti-TNFα, ce qui a permis pour la première fois de distinguer le risque lié aux thiopurines de celui lié aux antiTNFα.
Au cours d'un suivi de 6,7 ans en médiane, 123 069 patients n'ont jamais été exposés à aucun des deux médicaments, 50 405 à une monothérapie de thiopurine, 30 294 à une monothérapie d'antiTNFα, et 14 229 à une association des deux. En tout, 336 cas de lymphomes sont survenus, 220 chez les sujets non exposés (taux d'incidence IR pour 1 000 personnes-années 0,26), 70 chez ceux en monothérapie thiopurine (IR 0,54), 32 chez ceux en monothérapie anti-TNFα (IR 0,41) et 14 chez ceux traités par une association (IR 0,95).
Qu'en est-il dans les autres indications des anti-TNFα, en particulier rhumatismales telles que la polyarthrite rhumatoïde (PR) ? « Ces résultats dans les MICI ne sont pas extrapolables, explique Rosemary Dray-Spira. Pour la PR, la gravité de la maladie expose en elle-même à un risque augmenté de lymphome. Mais ces résultats incitent à renforcer la prudence à avoir vis-à-vis de ces produits et à regarder de plus près ce qu'il se passe dans les autres indications ».
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation