Amnesty International accuse le régime syrien d'avoir pendu entre 5 000 et 13 000 personnes en cinq ans, entre 2011 et 2015, dans la prison militaire de Saydnaya, à 30 km au nord de Damas. Une « politique d'extermination », dénonce l'ONG dans son rapport paru ce 7 février, intitulé « Abattoir humain : pendaisons et extermination de masse à la prison de Saydnaya ».
Interdite d'entrée sur le territoire par les autorités syriennes, Amnesty International s'est appuyée sur des entretiens menés – pour la majorité, au sud de la Turquie – en 2016 avec 84 témoins : 31 anciens détenus, quatre anciens gardiens, trois ex-juges syriens, trois médecins de l'hôpital militaire Tishreen, quatre avocats syriens, 17 experts nationaux et internationaux sur la détention en Syrie et 22 parents de détenus.
Selon le rapport, au moins une fois par semaine entre 2011 et 2015, des groupes de 20 à 50 détenus étaient traduits devant une cour martiale sise à Al-Qaboun, condamnés à mort à la suite d'une audience durant entre une et trois minutes – sentence dont ils ne prenaient connaissance qu'à l'ultime moment de leur vie. Puis ils étaient extraits de leur cellule, pour – leur disait-on – se rendre dans une prison civile. En réalité, ils étaient conduits dans un sous-sol où ils étaient battus deux ou trois heures de suite, puis pendus en pleine nuit.
« Tout au long de ce processus, ils restent les yeux bandés. Ils ne savent pas quand et comment ils mourront jusqu'à ce que la corde soit enfilée autour de leur cou », dénonce l'ONG. Après l'exécution, les corps des victimes étaient transférés à l'hôpital Tishreen pour y être enregistrés (la cause du décès stipulée : insuffisance cardiaque ou respiratoire) avant d'être enterrés dans des fosses communes dans les villages de Najha et Qatana, avance l'ONG.
La plupart des victimes étaient des civils considérés comme des opposants au gouvernement du président Bachar al-Assad. L'ONG assure que cette funèbre procédure était autorisée par les plus hautes instances du gouvernement et dénonce des crimes de guerre et contre l'Humanité, qui perdureraient toujours.
Tortures, souffrances physiques et psychiques
Amnesty International accuse aussi les autorités syriennes d'avoir mis sur pied un programme de torture. Les détenus de Saydanya sont victimes d'actes de torture mais aussi de violence sexuelle réguliers. Ils subissent des privations d'eau, de nourriture et de soins médicaux, et sont la proie d'infections et de maladies physiques et psychiques, dit l'ONG.
Le rapport relate plusieurs témoignages édifiants d'anciens détenus, victimes de viols ou d'humiliations. « Les horreurs décrites dans ce rapport révèlent une campagne cachée et monstrueuse, autorisée aux plus hauts niveaux du gouvernement, visant à écraser toute forme de contestation au sein de la population syrienne », a commenté Lynn Maalouf, directrice adjointe pour la Recherche au bureau d'Amnesty à Beyrouth.
Dans un précédent rapport paru en août 2016, l'ONG estimait que 17 723 personnes étaient décédées dans les geôles du gouvernement entre mars 2011 et décembre 2015.
Amnesty International réclame — moins de deux semaines avant de nouveaux pourparlers à Genève – l'arrêt immédiat des exécutions, tortures et traitements dégradants dans la prison militaire de Saydnaya et dans toutes les autres prisons de Syrie, ainsi que le déclenchement d'enquêtes impartiales et indépendantes, menées notamment sous l'égide de l'organisation des Nations unies.
Dans un entretien accordé à des journalistes belges et relayé par l'agence officielle Sana, Bachar al-Assad dit « ne prêter aucune attention à la Cour pénale internationale ou à aucune institution internationale (...) », qu'il accuse d'être « sous influence américaine, britannique et française ».
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