Le cauchemar a pris fin dimanche 5 février pour Kamal Fadlalla. Accueilli par des cris de joie et des accolades à l'aéroport JFK de New York, le médecin de 33 ans a retrouvé ses proches une semaine après une visite familiale au Soudan.
« Le voilà ! », a lancé Osama Mukhtar, un de ses amis lui aussi médecin, en l'apercevant au niveau des arrivées du terminal 4 de l'aéroport John F. Kennedy. Un cri de soulagement, car le retour aux États-Unis de Kamal Fadlalla fut kafkaïen.
Le Dr Fadlalla se trouvait en vacances dans son pays d'origine quand les rumeurs ont commencé à bruisser sur un potentiel décret de Donald Trump qui interdirait l'entrée sur le territoire américain aux ressortissants du Soudan et de six autres pays musulmans. Il s'est alors précipité pour acheter un billet et avancer son retour. Mais il n'a pas été assez rapide. Le week-end du 30 janvier, il se trouvait dans la queue pour embarquer sur son vol quand on lui a signifié qu'il ne pourrait pas voyager, en raison du décret appliqué immédiatement.
Depuis, il a assisté impuissant aux initiatives de ses amis, soutiens et avocats pour tenter de le faire revenir... Jusqu'à la décision prise vendredi soir par un juge américain, qui a renversé temporairement l'interdiction et rouvert les portes des États-Unis aux ressortissants des pays visés.
« Ça fait du bien » d'être de retour, s'est félicité Kamal Fadlalla à l'arrivée d'un vol en provenance de Dubaï. « Cela a été une semaine difficile, mais finalement… », a lâché, détendu, le médecin de Brooklyn, l'un des premiers à avoir rallié les États-Unis en profitant de la décision du juge de Seattle.
Autour de lui, les cris d'un groupe de blouses blanches enthousiastes venues l'accueillir à coups de « bienvenue à la maison ».
« C'était vraiment horrible, choquant »
La première chose que va faire le jeune homme originaire de Madani ? Appeler sa mère et sa sœur pour leur dire que tout va bien. « C'était vraiment horrible, choquant », a-t-il confié, à propos du décret migratoire qui vise à garder hors des frontières américaines pour au moins trois mois les citoyens d'Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen, ainsi que tous les réfugiés. « La justice c'est la justice, la loi c'est la loi, c'est un grand pays », a ajouté le praticien, assurant vouloir vite se remettre au travail et revoir ses patients.
Parmi les personnes venues attendre Kamal Fadlalla à l'aéroport, Letitia James, une responsable démocrate de la ville de New York, a jugé « anticonstitutionnel, illégal et immoral » le décret Trump. Selon elle, le président américain a « outrepassé son pouvoir ».
« Je crois en la liberté, je crois aux libertés individuelles et je pense que ce médecin, qui a tant fait pour le centre de Brooklyn, mérite une reconnaissance et a besoin de savoir que l'Amérique est un havre de paix », a-t-elle dit aux journalistes.
Khurram Mehtabdin, 30 ans, a lui aussi fait le déplacement, même s'il ne connaît pas personnellement Kamal Fadlalla. « Il est le genre de personnes qui donnent sa grandeur à ce pays », explique-t-il, dans un jeu de mots avec le slogan de campagne de Donald Trump. Les parents de Khurram Mehtabdin sont aussi médecins et sont arrivés 40 ans plus tôt aux États-Unis en vertu du même programme gouvernemental que le Dr Fadlalla. « Nous sommes tous anéantis. Ce n'est pas seulement pour les médecins, c'est aussi pour les chauffeurs de taxi, les gérants d'épiceries, c'est pour le monsieur-tout-le-monde dont la vie est désormais complètement brisée à cause de cette interdiction ridicule », peste-t-il.
« Je suis vraiment heureux », reprend Osama Mukhtar, ami et confrère de Kamal Fadlalla qui officie dans le même centre médical. Son fils de six ans peut désormais ranger sa pancarte, sur laquelle étaient inscrits les mots « Tu me manques Kamal ».
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