Réforme du bac : importance de l'oral

Blanquer dynamite l'éducation

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Publié le 22/02/2018
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Blanquer dynamite l'éducation

Blanquer dynamite l'éducation
Crédit photo : AFP

Quel gouvernement n'a pas tenté de réformer l'éducation nationale ? Mais quel gouvernement, avant celui-ci, est allé au bout de ses intentions ? Les réformes ont jalonné les 58 années de cette République. Aucune n'a été conduite avec autant de clarté, de précision, de patience et d'efficacité que celle de M. Blanquer. Certes, il n'en pas fini, tant il est vrai que sur le métier il faut remettre l'ouvrage, que tous les domaines de l'enseignement  n'ont pas encore été tous réformés, et que, à l'expérience, il faudra faire des ajustements. En outre, au nom d'une idéologie ou d'intérêts corporatistes, on sait bien que les enseignants ne vont pas suivre leur ministre comme un seul homme, qu'ils seront tentés, une fois encore, de freiner des quatre fers. Alors qu'il prône le changement et l'adaptation au monde contemporain, on lui reproche d'être conservateur, plutôt à droite, pour autant que l'intérêt de nos enfants ou de notre jeunesse puisse dépendre des convictions politiques d'un seul homme.

Le bon sens du ministre

La vérité est que M. Blanquer a eu tout le loisir de plonger les mains dans le cambouis, d'explorer les entrailles du mammouth et de déceler les raisons de sa maladie. La vérité est que nous en sommes tous au même point : nous ne comprenons pas pourquoi l'école de Jules Ferry qui a fait des Français des gens qui savent tous lire, écrire et compter, ne réussit plus à faire ce pour quoi elle a été inventée. M. Blanquer est donc déterminé par le simple bon sens. Il sait que, pour apprendre, il faut répéter à satiété. Il a été le premier à mettre en place des classes de douze élèves pour les enfants qui n'arrivent pas à suivre les cours. Saluée par le plus grand nombre, y compris chez les enseignants, la mesure est déjà critiquée. Parce que, pour faire des classes de douze, il faut priver les autres d'une ou de deux heures de cours. Ou parce qu'il y aurait des cas désespérés chez les élèves à la traîne.

Pas de réforme sans expérimentation. Il fallait se lancer dans le vide et c'est pourquoi Jean-Michel Blanquer a fait preuve d'audace quand il a engagé la réforme du bac. Personne n'ignorait que le baccalauréat ne prépare plus vraiment à la faculté et que, pour accéder à l'enseignement supérieur, il fallait en savoir plus. Le mot le plus employé par M. Blanquer, c'est « muscler ». Il fallait donc muscler le bac pour en faire un acquis utile pour la suite. Et puis, le savoir ne suffit pas, il faut aussi l'exprimer ; et que, pour l'exprimer, il faut acquérir une personnalité, donc parler sans complexes. Car c'est la base même de l'obtention d'un emploi. J'ai moi-même été très surpris d'apprendre qu'une seule faute d'orthographe dans un curriculum vitæ suffisait pour être écarté d'un recrutement. Alors que j'ai passsé ma vie à corriger des copies de journalistes dûment salariés, ce qui, d'ailleurs, ne me met pas à l'abri d'une erreur de syntaxe ou d'inattention.

Nous assistons donc au grand retour du français, de l'expression écrite et orale, du français partagé par tous les citoyens et non pas d'un langage explosé en divers patois ou argots auxquels on ne comprend rien si l'on en est resté à celui de l'école républicaine. Je crois que la « transformation » la plus importante qu'apporte cette réforme, c'est que, au lieu d'opposer les sciences aux humanités, on a décidé que les unes n'iraient pas sans les autres. On peut être un grand savant, on a besoin de transmettre dans une langue comprise de tous.

 

Richard Liscia

Source : Le Quotidien du médecin: 9642