Même sous les intempéries, pas question de perdre sa place dans la file. Ce vendredi, une dizaine de personnes patientent sous les averses de pluie pour se faire dépister du Covid, en attendant de pouvoir entrer dans la salle d'attente du laboratoire d'analyses de biologie médicale Biogroup, à Courbevoie (Hauts-de-Seine). L'accueil du laboratoire a des allures de ruche. Trois secrétaires médicales s'activent, pour enregistrer les patients, les appeler, les faire payer si nécessaire, trier les dossiers et envoyer les prélèvements vers la plateforme technique.
Personnes symptomatiques avec une ordonnance, asymptomatiques venus plus tôt ou personnes venues faire un contrôle « classique », chacun attend son tour patiemment, mais ce n'est pas toujours le cas. « Le mauvais temps a tendance à en refroidir certains car d'habitude, il y a encore plus de monde. Et parfois, les gens sont très énervés, notamment ceux qui partent en voyage et doivent obtenir un test rapidement », témoigne Hajar, l'une des secrétaires.
Étudiants mobilisés
La priorisation des personnes munies d'une ordonnance, symptomatiques et cas contacts (et des soignants), annoncée mi-septembre par Olivier Véran, ne change pas beaucoup la donne. « Pour moi, il n'y a pas de bonne solution. Les gens ne supportent plus d'attendre, que ce soit pour le test, ou les résultats. Aujourd'hui, nous arrivons à tout rendre en 24 heures, y compris les examens habituels car nous avons nos propres plateaux, mais on ne peut pas se multiplier par dix », abonde le Dr Thierry Bouchet, médecin biologiste et vice-président de Biogroup Ile-de-France. Face à l'afflux de demandes, le laboratoire fait appel à des étudiants en santé pour réaliser les prélèvements nasopharyngés, en plus des infirmières du site qui effectuent les prises de sang.
Philippe et Ariel, étudiants en médecine et en dentaire, gèrent une centaine de prélèvements par jour. « C'est aussi notre façon de participer à la crise, et ça fait un petit coup de pouce financier », résume Philippe, 20 ans, carabin de 3e année à Paris-Diderot. En blouse, masque FFP2 et lunettes de protection, il installe chaque patient et lui explique le déroulé du test. Après avoir frotté l'écouvillon dans chaque narine, il l'insère dans un tube, l'agite pendant dix secondes puis le jette.
Rigueur de mise
Ce tube, étiqueté, part ensuite sur l'un des trois plateaux techniques franciliens de Biogroup, où il rejoindra les 20 000 autres tests PCR réalisés quotidiennement par les 200 sites du groupe en région francilienne. Pour assurer des résultats dans les 24 heures, Biogroup a dû investir dans de nouvelles machines d'analyse des tests RT-PCR, dont le prix peut monter jusqu'à un million d'euros, et stocker suffisamment de réactifs (dont le coût représente 30 à 40 % du prix d'un test facturé 54 euros à la Sécu) pour éviter les pénuries.
Le plateau de Levallois-Perret, à quelques kilomètres de Courbevoie, est l'un de ces sites techniques. Trois nouvelles machines y ont été installées, et huit personnes récupèrent et analysent les petits tubes de 7 heures à 20 heures pour en extraire des résultats. « Une plaquette de 96 tubes demande un cycle d'analyse de quatre heures. C'est un travail très minutieux, mais aussi très stressant vu les enjeux. S'il y a un raté, on doit tout recommencer et cela rallonge les délais. Donc tout le monde doit être rigoureux », souligne le Dr Jacinthe Gholizadeh, biologiste médicale qui supervise le secteur RT-PCR.
Ces délais rapides — que tous les laboratoires de biologie médicale ne sont pas en mesure de tenir — induisent des rythmes de travail devenus éprouvants pour les acteurs de la chaîne de prélèvement et d'analyse. « C'est devenu dur physiquement pour tout le monde, et on serait plus heureux si la crise pouvait s'arrêter. Malheureusement, cela ne va pas s'arranger avec la grippe. On s'attend à fonctionner comme ça jusqu'à février 2021 », conclut le Dr Bouchet.
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