Élargir les compétences des infirmières : cette évolution est volontiers présentée comme une réponse possible à la désertification médicale et à la montée en gamme du métier. Mais qu'en pensent les médecins ? Selon une enquête conduite par la MACSF auprès de 1 149 sociétaires (médecins mais aussi infirmiers ou cadres de santé) – et contrairement à certaines idées reçues – plus de six praticiens sur dix se déclarent favorables à un élargissement du champ de compétences des infirmières. Ils sont également à 67 % à être en faveur d'une plus large délégation de tâches aux infirmières.
Les médecins de terrain plus ouverts que leurs syndicats ?
Dans les déserts médicaux, 61 % des praticiens estiment que les infirmières pourraient intervenir davantage sur des « actes médicaux simples ». Dans dix ans, cette solution se fera d'ailleurs « plus souvent qu’aujourd’hui » pour 63 % des médecins interrogés.
D’une manière générale, l’enquête de la MACSF montre que les praticiens sur le terrain sont plus positifs sur l’élargissement du rôle des infirmières que n’ont pu le laisser penser les prises de parole publiques récentes à l’occasion des débats parlementaires sur la loi Rist (sur l'accès direct).
Ainsi, un confrère interrogé dans l'étude voit l’infirmière de demain comme « une vraie auxiliaire de soins avec prise de responsabilités moyennant une amélioration des connaissances médicales qui se sont amoindries ces dernières années ». Un autre prédit « plus d'autonomie, plus de responsabilités et un travail plus synergique avec les médecins ».
Médicaments, examens : des réticences
Mais cette ouverture n'est pas sans limites et des crispations existent. Les médecins interrogés se montrent très réticents à ce que les infirmiers prescrivent des médicaments (76 % de voix défavorables), renouvellent les ordonnances (64 % de contre) ou prescrivent des examens complémentaires (à 58 %).
Leur opposition tranche avec le point de vue des infirmiers qui sont, eux, favorables à la prescription des médicaments (51 %), au renouvellement des ordonnances (71 %) et à la prescription des examens complémentaires (74 %).
Et demain ? Les infirmiers moins optimistes pour eux-mêmes
Interrogés sur l'avenir de la profession infirmière, les médecins se montrent en majorité optimistes (55 %) sur la reconnaissance accrue du travail des infirmiers (alors que les infirmiers sont de leur côté beaucoup moins optimistes – un sur cinq pense que leur travail sera mieux reconnu). Même constat décalé en ce qui concerne la valorisation financière du métier infirmier, puisque 59 % des médecins estiment qu'il sera davantage valorisé dans dix ans (contre 21 % des premiers concernés).
Avec l'évolution des compétences et des périmètres des métiers, médecins et infirmiers évoquent le risque médico-légal accru. Les infirmières sont plus de 8 sur 10 à avoir l’impression qu’elles sont plus exposées aujourd’hui qu’il y a cinq ans à ces risques. Et la conviction est encore plus forte, lorsqu’on se projette dix ans : 9 répondants sur 10 estiment que l’exposition aux risques médico-légaux des infirmières sera supérieure.
* Enquête en ligne conduite par la MACSF du 19 avril 2023 au 1er mai 2023 auprès de 1 149 sociétaires (209 étudiants ou internes ; 315 médecins ; 584 infirmiers ; 41 cadres de santé ou directeurs des soins).
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