La Mutualité française (FNMF) dévoile la quatrième édition de son Observatoire-Place de la santé consacré à l’accès territorial aux soins. Dans cette double étude effectuée auprès du grand public et des professionnels de santé*, la Mutualité entend démontrer que « sans mesures fortes sur l’organisation des soins (...), l’accroissement des inégalités est inéluctable ».
Effet ciseaux
L'analyse de la Mutualité repose sur un double constat qui aboutit à mettre en tension le système de santé : l’augmentation de la demande de soins et la « contraction » de l’offre médicale, de plus en plus « disparate ». Cette tendance est amenée à « se poursuivre » si rien n'est fait, déplore la Mutualité. En 2018, plus d’un dixième de la population (11,1 %, soit 7,4 millions de personnes), vit dans une commune où l’accès à un généraliste est limité (contre 7,6 % en 2012). En parallèle, le nombre de médecins de famille aura baissé de 13 % entre 2010 et 2025 sous l’effet conjugué de deux phénomènes : départs à la retraite programmés (en 2019, 45 % des généralistes ont 55 ans ou plus) et baisse du numerus clausus des années 1980-1990. Dans le même temps, note la FNMF, la population de 60 ans et plus aura augmenté de presque 30 % entre 2010 et 2025.
Autre clignotant, 5,2 millions de personnes ont effectué des consultations hors parcours de soins en 2019. La moitié de ces personnes souhaiteraient désigner un médecin traitant, mais n’en a pas trouvé, rappelle la Mutualité. Côté soins spécialisés, le tableau n'est pas plus reluisant : le délai médian d’obtention d’un rendez-vous chez un ophtalmologiste est de 71 jours dans les communes les plus isolées. Un Français sur deux (51 %) anticipe une « restriction » de l’accès aux soins dans les prochaines années.
Les Français ouverts aux délégations
Face à ces constats, la Mutualité soutient une série de mesures offensives.
Elle prône d'abord un « recours optimisé aux compétences médicales et paramédicales » et une réorganisation de l'offre de soins fondée sur les nouvelles pratiques, le travail en équipe transdisciplinaire et le numérique. D'après la FNMF, le « succès » de la télémédecine et de la vaccination antigrippale par les pharmaciens — une mesure « efficace » avec 25 % du total des vaccinations réalisées en 2019 — sont autant de preuves qu'on peut réduire les inégalités d’accès aux soins, qui ne sont pas une « fatalité ».
Interrogés, les Français confirment la position de la FNMF : 80 % d'entre eux estiment que les téléconsultations sont une réponse aux enjeux d’accès aux soins et 67 % une « solution utile » pour un second avis. 64 % pensent que la téléconsultation doit être « largement encouragée ». Un Français sur quatre affirme d'ailleurs avoir déjà tenté l'expérience. 57 % se disent aussi prêts à expérimenter la délégation d’actes médicaux « par d’autres professionnels de santé qui ne les pratiquaient pas auparavant ». Ça coince davantage côté professionnels, admet la Mutualité, qui constate dans les témoignages recueillis de « vives tensions » sur le sujet.
Défaut de notoriété des CPTS
S'il ne « compense pas complètement les insuffisances de l’offre médicale », le développement de l’exercice coordonné (maisons et centres de santé, communautés professionnelles territoriales de santé) « permet un rééquilibrage de l’offre de soins », apprécie la Mutualité. Les centres et les maisons de santé sont désormais bien ancrés dans l'esprit des patients. 85 % des Français interrogés par la FNMF les connaissent, dont 56 % savent « précisément ce dont il s’agit ».
En revanche, un travail de communication est nécessaire pour les CPTS, ces pools de libéraux inconnus de 63 % du grand public. « Sous leur forme actuelle, les CPTS peuvent être perçues comme un échelon administratif supplémentaire n’assurant pas de réelle coordination, bien que disposant de moyens financiers supplémentaires », regrette la Mutualité.
* Enquête réalisée en ligne du 20 au 24 août auprès d’un échantillon de 1 001 personnes représentatif par Harris Interactive pour la FNMF ; étude qualitative de cinq triades réalisées en ligne du 27 au 30 juillet, réunissant dermatologues, ophtalmologues, orthoptistes, pharmaciens, médecins généralistes et infirmiers.
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