Parallèlement au « grand oral » sur la santé qu'elle organisait ce jeudi avec les candidats à la présidentielle, la Fédération hospitalière de France (FHF) a dévoilé les résultats d’un sondage Ifop sur les attentes des professionnels de santé et des Français, qui montre la perception d'une situation très préoccupante de notre système de santé mais aussi la défiance vis-à-vis des politiques sur ces sujets centraux.
Système à bout de souffle
De fait, la situation n’a jamais semblé aussi alarmante, surtout du point de vue des blouses blanches. Premier constat : 83 % des soignants se disent « fatigués » par deux années de crise sanitaire, tandis que 60 % d’entre eux considèrent que leurs conditions de travail ne sont pas satisfaisantes. En première ligne, les professionnels de santé jugent même à 60 % que notre système de santé est « en détresse », contre seulement 30 % des Français dans leur ensemble. Moins alarmiste, la population générale préfère parler de « fragilisation » (46 %).
Et quand on les interroge sur ces fragilités à la lueur de la crise, 65 % des professionnels pointent le manque criant de moyens humains – contre 49 % des Français. Un avis partagé ce jeudi par Frédéric Valletoux, président de la FHF, qui observe « un système à bout de souffle, tenant uniquement grâce à la mobilisation et à l’abnégation de celles et ceux qui le portent à bout de bras au quotidien ».
Sentiment de crise systémique
Soignants comme population générale partagent ainsi un niveau de préoccupation très élevé concernant le système de santé français qui témoigne, selon l'Ifop, d’un « sentiment de crise systémique ». Plus de 90 % d'entre eux se disent « préoccupés » par la situation de l’hôpital public, les effectifs médicaux en France et l’accompagnement des aînés dépendants. Sur ce point, Frédéric Valletoux juge urgent de répondre à l’enjeu du grand âge car « nous savons que les temps du quoiqu’il en coûte s’achèveront bientôt et que nous ne pourrons pas supporter une nouvelle cure d’économies comptables ».
Sans surprise, 75 % des Français comme des soignants déplorent la dégradation de la situation en matière d’accès aux soins. La même proportion se dit inquiète du niveau de reste à charge à payer mais aussi des écarts de rémunération entre soignants du public et du privé. Ainsi, trois Français sur dix ont déjà renoncé à se faire soigner pour des raisons financières alors que 40 % d’entre eux ont tiré un trait sur une consultation médicale en raison de la difficulté à trouver un professionnel de santé dans leur région.
Regard désabusé sur la campagne
Sur ces bases, le sondage montre que les Français portent un « regard désabusé » sur la campagne présidentielle, diagnostique l'Ifop. 82 % des professionnels de santé et 70 % du grand public jugent que les questions de santé sont insuffisamment traitées. Une situation jugée « très préoccupante » par Frédéric Valletoux. « On a passé deux ans à gérer l’urgence et tout se passe comme si les candidats voulaient faire l’impasse sur l’après », se désole le maire de Fontainebleau.
Pire, 80 % des soignants expriment une forme de « défaitisme » quant à la capacité du politique à changer les choses. Des Français et des soignants qui citent quatre propositions majeures susceptibles d'orienter leur vote : le recrutement de professionnels de santé, la revalorisation des salaires des soignants, l’investissement pour le grand âge et la réduction des inégalités territoriales d’accès aux soins. Et pour répondre à la problématique des déserts médicaux, 59 % des Français souhaitent que le nouveau gouvernement réunisse des « états généraux », une proposition que soutient justement la FHF…
Des candidats qui peinent à convaincre
Au-delà, les Français semblent plébisciter plusieurs mesures défendues par la FHF : mise en place dès le début du quinquennat d’une loi grand âge et autonomie (91 % de soutien) et instauration d’un débat national sur l’avenir de notre système de protection sociale, « notamment sur le rôle des complémentaires santé » (87 %). En matière de prévention, ils sont favorables à la création d’un indicateur politique fort mesurant l’espérance de vie en bonne santé, à l’instar du PIB. Les professionnels de santé (79 %) et le grand public (84 %) militent pour que le financement public soit conditionné à des « mesures de régulation fortes », relève aussi le sondage.
Enfin, l'enquête traduit des niveaux de confiance « exceptionnellement bas » quant à la capacité des différents candidats à répondre aux enjeux de santé en France. Emmanuel Macron, qui vient de présenter son programme, convainc à peine 30 % des soignants. Quant aux Français en général, ils font confiance, dans l'ordre, pour répondre aux problématiques du système de santé aux candidats suivants : Marine Le Pen (38 %), Emmanuel Macron (35 %), Valérie Pécresse (32 %), Jean-Luc Mélenchon (32 %), Jean Lassalle (28 %), Éric Zemmour (27 %), Fabien Roussel (25 %), Philippe Poutou (24 %), Nathalie Arthaud (23 %), Yannick Jadot (23 %) Anne Hidalgo (23 %), Nicolas Dupont-Aignan (22 %).
Les mauvaises langues en concluront sans doute que les programmes santé des candidats ne sont pas à la hauteur des enjeux actuels. Frédéric Valletoux a souhaité en tout cas que « le vent de la transformation souffle enfin sur notre système de santé » durant le prochain quinquennat.
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