Rarement ministre de la Santé aura conduitune négociation dans des conditions aussi extrêmes. Question d’agenda, d’abord. À peine quatre mois après son arrivée aux manettes, Olivier Véran ne dispose plus que de quelques jours pour conclure un Ségur de la santé crucial pour le monde du soin et au-delà pour la société dans son ensemble. Il agit sous une pression syndicale forte, une nouvelle manifestation d'hospitaliers étant encore prévue ce mardi. Et dans un contexte politique incertain, y compris pour lui-même : un remaniement ministériel est en effet dans les tuyaux.
Pour ne rien arranger, le ministre doit mener sa barque dans des conditions météo exécrables. En moins de deux ans, la trésorerie de la Sécurité sociale s’est dégradée comme jamais. Alors que l’équilibre semblait à portée de main il y a deux ans, on se retrouve face à un « trou » de plus de 30 milliards d’euros de déficit probable à la fin de l’année pour la seule assurance-maladie ! Entre-temps, trois séismes majeurs ont grippé la machine à cash. Crise sociale, d'abord, avec la révolte des gilets jaunes qui s’est soldée par des mesures à destination des plus défavorisés. Crise sanitaire, ensuite, le Covid ayant nécessité des adaptations urgentes de notre système de soins. Crise économique, enfin, avec un chômage record et des plans de soutien à des pans entiers de l’économie.
Inflation de dépenses, pénurie de recettes, revendications exacerbées… C’est avec des budgets sociaux aussi mal en point que le gouvernement doit se montrer généreux. Il va devoir financer, non seulement la création d'un cinquième risque pour solvabiliser la dépendance, mais aussi des revalorisations historiques pour les acteurs de santé. Le tout en mettant la pédale douce sur les économies de santé, parce que ce n'est pas le moment… Attention, les blouses blanches ne se contenteront plus de demi-mesures. Les pouvoirs publics ne peuvent donc se dérober, car les soignants – et pas seulement les hospitaliers – savent pertinemment que le train ne repassera pas deux fois…
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