A la place de la suppression de l'ISF, un barême qui aurait épargné ou taxé plus légèrement les « petites fortunes » n'était-il pas souhaitable ? La baisse de cinq euros de l'aide personnalisée au logement était-elle socialement et politiquement judicieuse ? Le sort réservé aux collectivités locales ne relève-t-il pas d'une sorte d'animosité jacobine à l'égard des territoires (et de leurs populations) ? La hausse de la CSG, qui comporte des compensations ou des exceptions, est-elle une bonne façon de percevoir des recettes fiscales ? Et qui nous prouve que ce faisceau de mesures hâtera la croissance et diminuera le chômage ?
Ces questions, parmi d'autres, sont légitimes et forment le fer de lance des oppositions de droite et de gauche. Dans les débats à l'Assemble, la gauche s'est presque réconciliée lors du combat de ses élus contre la suppression de l'ISF. La droite est plus virulente, parfois de mauvaise foi, quand elle critique la baisse des APL ou du nombre des emplois aidés, alors qu'elle en connaît fort bien le coût pour l'Etat, mais parfois efficace. Un seul exemple : le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, infatigable dans la défense du budget de 2018, se plaint bruyamment d'une décision des socialistes au pouvoir (en 2012), la surtaxation de 3 % des dividendes que le Conseil constitutionnel a jugé illégale, ce qui oblige le gouvernement actuel à rembourser 10 milliards aux mêmes entreprises. Une paille. Les Républicains lui ont aussitôt fait remarquer que, à l'époque, l'ancien ministre de l'Economie Emmanuel Macron était responsable de cette mesure malheureuse. L'argument a plu à Christian Eckert, ancien ministre du Budget, qui en a rajouté. Le chef de l'Etat n'échappe pas à son passé.
Le nouveau bréviaire
Cependant, les choix énergiques du gouvernement ont changé la nature des débats publics, l'espace même où se joue la bataille politique, et les mentalités. Le président a modifié les règles du jeu, a choisi les armes, a contraint la classe politique à se battre sur un terrain balisé. L'objectif n'est plus de dépenser plus en feignant de faire des économies, de saupoudrer de largesses aux amis et adversaires, de durer politiquement en ne faisant rien. L'objectif est d'obliger la totalité des forces vives, économiques, sociales et politiques à raisonner à partir d'un bréviaire entièrement nouveau. Bien sûr, on voit encore des manifestations, on entend des discours incendiaires et une grogne sociale qui peut se transformer en un mouvement plus inquiétant. Mais, il y a six mois encore, personne ne raisonnait comme aujourd'hui. Allons-nous prendre des risques pour sortir la France de l'ornière où elle est enfoncée ? Telle est la question.
M. Macron n'est sans doute pas très populaire, mais son élection, sa majorité et son discours ont réveillé l'entreprenariat. Les affaires, les start-up, l'alternative à l'emploi salarié, la prise de risque, la volonté d'agir semblent être dopés par une action politique dont on dira ce qu'on voudra mais qui convient parfaitement à tous ces acteurs de l'économie qui comptent plus sur eux-êmes que sur l'Etat. Il est impossible, malgré les faillites, la douleur des travailleurs qui perdent encore leur emploi, la précarité croissante, de ne pas sentir le retour de la confiance en soi qui faisait défaut à nos concitoyens depuis longtemps et que confirmeront l'an prochain une croissance, plus vive, des exportations en hausse, des succès techniques et commerciaux.
Nous nous garderons bien d'attribuer au président et à son équipe le mérite de cette nouvelle dynamique, dont François Hollande ne craint pas de dire qu'il l'a amorcée. Il se peut, simplement, que la crise de 2008 ait enfin été vaincue et que le gouvenrement bénéficie d'un printemps économique qu'il n'a pas provoqué. Si c'est vrai, notre chance sera alors de pouvoir gérer la croissance avec, enfin, des instruments nouveaux.
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