Un chirurgien-dentiste sur trois refuse des soins aux patients séropositifs selon un « testing » mené par AIDES

Publié le 04/06/2015

Environ un chirurgien sur trois contacté par les militants de l’association AIDES dans le cadre d’un testing a refusé, directement ou indirectement, de prendre en charge des patients qui déclaraient leur séropositivité. Au cours de l’expérimentation, les militants ont procédé en adressant deux appels téléphoniques à chaque médecin, afin de prendre rendez-vous pour un détartrage.

Le premier provenant d’un patient qui annonce sa séropositivité, et le second provenant d’un autre patient ayant les mêmes caractéristiques sociodémographiques mais ne déclarant pas de séropositivité. Un total de 34 testeurs se sont prêtés à l’expérience dont 17 « séropositifs VIH » et 17 « ne déclarant pas leur séropositivité ». Au total, 440 cabinets dentaires ont été contactés (20 % de dentistes, 80 % de secrétaires) dans 20 villes françaises.

Dans 3,6 % des cas, les patients « séropositifs » ont essuyé un refus direct en fonction de leur séropositivité. Les motifs invoqués ont été soit, annoncés de manière frontale lors de la demande de rendez-vous, soit mis en évidence par l’observation de traitements différenciés entre le testeur séropositif au VIH et son binôme ne déclarant pas sa sérologie au VIH. AIDES ne précise cependant pas la proportion exacte de médecins qui ont clairement annoncé que la séropositivité était le motif du refus de prise de rendez-vous.

La technique de l’anguille

Les refus de soins déguisés, plus subtils, concernaient eux 30 % des réponses. Dans ces cas-là, la prise en charge n’était pas refusée, mais le patient était découragé par d’autres méthodes : horaires contraignants (en fin de journée), dépassements d’honoraires, assurance de la solvabilité financière.

La réorientation vers un service hospitalier ou un confrère, prétextant un manque de connaissance de la pathologie et de sa prise en charge, un matériel non adapté ou la dangerosité des soins venait compléter l’arsenal des motifs évoqués par les praticiens de mauvaise volonté. Selon AIDES, 16,8 % des dentistes et secrétaires ont invoqué au moins un motif jugé discriminatoire.

Afin d’appuyer sa démonstration, l’association a accompagné ses résultats d’un florilège de réactions de praticiens contactés par ses militants :

Les gynécologues plus tolérants ?

« Chaque projet de loi de santé a prétendu s’attaquer au problème des refus de soin », note l’association qui dénonce « les lobbies pro médecins » dont l’action est parvenue à faire « capoter » les avancées prévues dans la loi Bachelot. « Les mesures envisagées dans la loi Santé défendue aujourd’hui par Marisol Touraine sont insuffisantes, très en deçà des enjeux », estime en outre AIDES.

Selon l’association contactée par « le Quotidien du Médecin », « les chirurgiens dentistes et les gynécologues ont été choisis en raison des remontées de terrain. Ce sont les deux spécialités qui se distinguent dans les témoignages qui nous parviennent. » Les gynécologues ont donc également fait l’objet d’une campagne de testing, mais les résultats « n’ont pas confirmé ce que nous affirmaient les militants, ce qui est une bonne chose ».

Le refus de soin à un patient sur la base de son statut sérologique expose le praticien à des sanctions venant de sont ordre professionnel. Jusqu’à présent, une seule plainte a été déposée, en 2011, contre un chirurgien-dentiste de La Rochelle. Le praticien s’était vu notifier, en novembre 2013, un blâme de la Chambre disciplinaire nationale de son l’ONCD.

Damien Coulomb

Source : lequotidiendumedecin.fr