Le président de la République a lancé une sorte de blitzkrieg réformiste qui vise à prendre de court tous les acteurs sociaux. Il le fait sciemment et revendique sa méthode. Elle a, effectivement, permis de mettre en place une série de réformes qui n'ont pas mobilisé les syndicats, comme figés sur place par la vitesse et la répétition des actions du pouvoir. Mais cela fait dix mois que M. Macron est à l'Élysée, et ce qui a fonctionné pendant quelques mois risque, cette fois, de provoquer une crise profonde. Car les syndicats estiment n'avoir pas d'autre choix, face au marathon du gouvernement, que d'y mettre le holà en paralysant le pays. Pour le moment, le président, le Premier ministre et les ministres n'ont pas cillé. Mais ils n'ont pas commencé non plus à être interpellés par l'opinion sur les effets des grèves.
Peut-on parler d'une erreur de calcul, à la fois des pouvoirs publics et des syndicats ? Dans le cas de l'équipe gouvernementale, il n'est pas difficile de noter quelques mesures maladroites qui auront beaucoup contribué à secouer l'opinion, seule juge en définitive. Dans le cas des syndicats, on a toutes les raisons de s'étonner de ce qu'ils se soustraient au dialogue alors que la réforme du statut de la SNCF passe encore par des négociations, notamment sur le rachat de la dette par l'État. En réalité, ce qui motive les organisations syndicales, c'est l'exaspération, la certitude que, quoi qu'ils proposent, les réformes passent toujours dans les termes décidés par le gouvernement, sans qu'elles soient modifiées par l'avis syndical ou les amendements parlementaires.
Les Français décideront
Mais il faut comparer le sérieux du gouvernement, son assiduité au travail, sa bonne connaissance des dossiers, et la qualité des conseils ou des critiques qu'il reçoit. La gauche essaie de présenter M. Macron comme un émule de Bonaparte et ne s'exprime jamais qu'au nom de ces pauvres ou ces déshérités dont on ne souvient pas qu'elle les ait si bien défendus quand elle était aux manettes. La droite, elle, est trop contente, sous la houlette de Laurent Wauquiez, de trouver des défauts, n'importe lesquels, à ce président et à sa majorité, comme si M. Macron n'était pas en train, dans des domaines essentiels, de réaliser les promesses que la droite a lancées sans les tenir. Quand Dominique de Villepin, ancien Premier ministre de Jacques Chirac, conseille au pouvoir, avec toute la condescendance du vieux routier de la politique, de tenir compte de la souffrance du peuple, sonné par les réformes, on a envie de lui rappeler avec quel entêtement, à l'occasion du CPE (contrat de première embauche, en 2006), il s'est entêté malgré l'embrasement des cités, ce qui a conduit le président Chirac à annoncer que la loi serait « promulguée mais pas appliquée ». Compte tenu de cette bizarrerie historique, M. de Villepin n'est peut-être pas le mieux placé pour donner à qui que ce soit des conseils de prudence.
En réalité, ce sont les Français qui décideront de l'avenir de cette majorité, de la pérennité des syndicats et de leur propre sort. En 1995, en dépit d'une grève interminable, extraordinairement dure, qui a mis la France à genoux, la population, dans son ensemble, soutenait le mouvement. Aujourd'hui, c'est beaucoup moins sûr. Ce qui, dans la réforme de la SNCF, semble odieux et autoritaire aux yeux des syndicats, apparaît à une grande partie du public comme la prolongation d'une politique réformiste, largement annoncée par le candidat Macron, qui n'a jamais caché ce qu'il entendait faire sur ce plan. L'immense affection que les cheminots et notre réseau ferroviaire inspirent aux Français s'est en outre émoussée à la faveur d'une ponctualité très relative et d'incidents ou pannes inacceptables. Il ne reste plus qu'à assister au spectacle, avec fatalisme.
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