Et si Marine Le Pen était élue dimanche soir ? Cette hypothèse est redoutée depuis des mois par Jacques Attali. L’ancien sherpa de François Mitterrand sait de quoi il parle, car pour le candidat socialiste, c'est bien la troisième fois qui fut la bonne... Au-delà de l'anecdote, si l'ex-conseiller à l’Élysée crie au loup, c’est surtout parce qu’il craint que le « dégagisme » dont a bénéficié Emmanuel Macron il y a cinq ans, lui joue des tours en 2022. Et de fait, même si les enquêtes d’opinion donnent le président sortant toujours en avance, il est clair que le RN n’a jamais paru aussi près du pouvoir…
Que se passerait-il pour le système de santé si cela devait advenir ? «Le Quotidien» a décidé d'interpeller ainsi ses lecteurs cette semaine. Pas pour délivrer des consignes de vote : ce n’est pas le genre de la maison. Les médecins n’en auraient d’ailleurs cure, n’ayant jusque-là guère manifesté d'attirance pour l'extrême droite. Pour autant, il nous semble qu’un soignant averti en vaut deux, à l’heure même où le RN tente de « banaliser » son programme, s’agissant par exemple des déserts médicaux délaissés, des hôpitaux sous-dotés ou des Ehpad abandonnés.
Notre dossier cette semaine pointe l’opportunisme d’un parti qui se nourrit des crises pour prospérer. La pandémie lui aura, de ce point de vue, permis de se distinguer -comme aux débuts des années sida- réclamant l’accès à des traitements anti-Covid dont les effets n’étaient pas prouvés et l’innocuité pas établie ou jugeant légitime le combat des antivax, y compris s’agissant des quelques récalcitrants parmi les blouses blanches. Les experts que nous avons sollicités pointent aussi le simplisme des solutions proposées pour le système de santé. Qui peut ainsi croire que la lutte contre la fraude sociale pourrait permettre de dégager à elle seule les moyens qu'il faut à l’hôpital comme en ville ? Question de crédibilité, mais aussi de principe. Car même si Marine Le Pen a purgé le programme du RN de certaines de ses obsessions maladives, la « priorité nationale » reste de mise. Cela se déclinerait sur les ressources humaines avec une « réduction drastique » du recours aux praticiens étrangers qui semble complètement irréaliste. Et surtout concernant l’accès aux soins, puisque la candidate du Rassemblement national se fait fort de démanteler l’aide médicale d’État (AME) pour les sans-papiers en la cantonnant aux seuls cas urgents. Ce projet suscite évidemment des objections éthiques dans le corps médical. Et des interrogations aussi, car on doit bien sûr redouter ses effets collatéraux en termes de santé publique.
Ce n’est pas tout. L'élection de Marine Le Pen sonnerait également le glas de la lutte contre le réchauffement climatique (survolée), de la dynamique européenne (oubliée), et de l'innovation technologique (l'impensé du programme RN). Trois évolutions qui ne seraient évidemment pas sans conséquence à terme sur le système de soins. Enfin, sur le casting, on se demande bien quelle personnalité elle choisirait pour mettre en musique avenue de Ségur une politique de santé aussi baroque ?
Exergue :
Les experts pointent le simplisme des solutions du RN pour le système de santé
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