LE RAPPORT attendu depuis au moins un an a fini par être dévoilé, dans un quotidien national (« Libération » du 21 octobre). Un an après la première partie des recommandations sur l’infection à VIH, qui marquait la fin du double test, la deuxième partie devrait profondément modifier l’ensemble du dispositif de dépistage en France, comme le souhaitait le CNS dans son rapport de novembre 2006. La stratégie en deux volets vise essentiellement à améliorer la détection précoce de l’infection et à réduire le retard au dépistage. Le premier volet concerne la population générale : « La proposition de tests de dépistage devrait être faite à l’ensemble de la population âgée de 15 à 70 ans, hors notion d’exposition à un risque de contamination ou caractéristique particulière », explique le Dr Olivier Scemama, rédacteur du rapport pour la HAS.
La mise en uvre de cette stratégie implique la mobilisation de tous les acteurs du dépistage, et particulièrement les généralistes. « L’idée est de sortir la proposition de dépistage de la notion de comportement à risques afin de modifier le regard porté sur le dépistage du VIH et de promouvoir l’idée qu’une meilleure connaissance du statut sérologique peut apporter un bénéfice important tant au niveau individuel que collectif », souligne le Dr Scemama.
Le deuxième volet des recommandations vise de manière spécifique les groupes de population particulièrement affectés par le VIH en France. Elle consiste en une « proposition ciblée et régulière » du test de dépistage chez les homosexuels multipartenaires, les usagers de drogue injectable, les patients originaires d’une zone de haute prévalence de la Caraïbe ou d’Afrique subsaharienne. Le test leur sera proposé tous les ans. Des recommandations particulières sont aussi formulées pour la Guyane, avec un test de dépistage proposé tous les ans à la population générale dans le cadre des services de soins primaires, médecins généralistes et dispensaires, et du recours aux soins hospitaliers. Les tests de dépistage rapide y sont fortement recommandés afin d’atteindre les groupes qui n’ont pas accès au dispositif classique de dépistage.
Ce n’est pas le cas dans les autres départements. « Nous ne sommes pas revenus sur l’utilisation des tests rapides, précise le Dr Scemama. Le dépistage doit reposer sur les tests Élisa combinés déjà recommandés dans la première partie des recommandations, le recours aux tests rapides n’étant justifié que dans un cadre médicalisé en cas d’urgence au niveau individuel et dans un cadre organisationnel particulier (urgences, actions associatives) faisant actuellement l’objet d’une expérimentation ».
Diminution de la mortalité.
Les mesures devraient être accueillies favorablement par l’ensemble des acteurs. Le Pr Willy Rozenbaum, qui, avec le CNS, appelle depuis trois ans à un changement de paradigme, « se félicite de ces nouvelles recommandations qui, pour l’essentiel, reprennent celles formulées par le CNS en novembre 2006. Il est dommage que cela ait tardé pendant si longtemps mais les autorités n’avaient pas pris la mesure du problème et ont souhaité consulter plus largement. » Interrogé par « le Quotidien », le président du Conseil tient à rappeler l’enjeu important d’un tel changement de stratégie : « La mortalité est 4 fois plus importante dans les six mois qui suivent le diagnostic lorsque le diagnostic est tardif et cette surmortalité perdure quatre ans après. » Par ailleurs, « on sait qu’une personne qui se sait contaminée a quatre fois plus de chances de modifier ou d’adapter son comportement de prévention que celle qui ignore son statut sérologique ».
L’enjeu en termes de prévention est d’ailleurs double : en plus du changement de comportement attendu, en cas de dépistage positif, les personnes dépistées pourront être traitées. « On sait que le traitement induit une diminution du risque de transmission. Même avec les recommandations actuelles, 85 % des personnes dépistées bénéficient aujourd’hui d’un traitement », note-t-il.
Des recommandations à la pratique, l’infectiologue sait que rien ne sera simple : « La recommandation de test unique publiée il y a un an n’est toujours pas appliquée. La pratique de tests dans les services d’urgence peut être difficile à mettre en uvre et les généralistes peuvent éprouver quelques réticences à prendre en charge l’annonce d’un test positif », souligne-t-il. La HAS a d’ailleurs recommandé un accompagnement et une communication spécifique de ces professionnels de santé de même que des campagnes d’information à destination du grand public. La balle est aujourd’hui dans le camp du ministre de la Santé.
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