Alors que l'Espagne reconfine certaines zones en raison d'un nombre de cas élevé de Covid-19, une étude nationale de séroprévalence parue dans « The Lancet » montre que 5 % de la population a été infectée par le SARS-CoV-2 et qu'un tiers des personnes infectées sont restées asymptomatiques.
« Dans cette grande étude basée sur la population, nous avons trouvé une proportion très modeste de personnes présentant des anticorps IgG contre le SARS-CoV-2, en utilisant deux types de tests immunologiques différents, indique au « Quotidien » Marina Pollán, première auteure de l'étude. Nos résultats montrent ainsi l'impossibilité d'atteindre l'immunité collective dans un avenir proche sans imposer un lourd tribut au système de santé et sans accroître la mortalité. »
Plus de 10 % des individus infectés autour de Madrid
Un échantillon de 35 883 foyers a été sélectionné de manière aléatoire. Entre le 27 avril et le 11 mai 2020, 61 075 personnes ont accepté de répondre à un questionnaire portant sur les antécédents de symptômes évocateurs de Covid-19 et les facteurs de risque. Tous les participants ont eu un test sérologique rapide et un prélèvement sanguin a été réalisé chez les volontaires en vue d'un test immunologique en laboratoire basé sur des microparticules chimioluminescentes. Les résultats témoignent d'une bonne performance du test rapide comparée à l'autre test.
L'étude montre que les enfants de moins de 10 ans ont été moins touchés par l'épidémie (< 3,1% estimés avec les tests rapides) et révèlent des disparités géographiques. Autour de Madrid, plus de 10 % des individus ont été infectés, alors qu'ils sont moins de 30 % à l'avoir été au niveau des zones côtières. « Cette grande variabilité géographique - qui à quelques exceptions près s'explique par la différence de disponibilité des tests RT-PCR - est corrélée à l'intensité de la vague épidémique », précise Marina Pollán.
La proportion de participants n'ayant pas rapporté de symptômes Covid malgré un test sérologique positif va de 21,9 à 35,8 %. Autre constat : seuls 19,5 % des patients séropositifs ont bénéficié d'un test RT-PCR au préalable.
« Notre étude confirme également que le fait de vivre avec un cas de Covid-19 confirmé ou suspecté augmente considérablement le risque d'infection, ce qui montre la difficulté d'isoler certains individus chez eux », relève Marina Pollán. La séroprévalence était en effet de 31,4 à 37,4 % chez ceux qui avaient un cas confirmé dans leur foyer.
« La probabilité d'infection augmente également avec d'autres types de contacts (travail, entourage…), ce qui devrait être pris en compte alors que tout le monde recommence à se déplacer et à se rassembler lors d'événements sociaux de différents types », poursuit l'auteure.
Des efforts à poursuivre en Espagne et en France
Le Pr Arnaud Fontanet, épidémiologiste à l'Institut Pasteur et membre du Conseil scientifique sur le Covid-19, s'est exprimé au micro de France Inter ce 6 juillet sur la situation espagnole : « C'est vraiment un signal d'alerte pour nous. On s'est rendu compte depuis quelques semaines que l'on avait besoin de recommencer à vivre (...), je le comprends parfaitement, mais maintenant il faut peut-être que l'on se ressaisisse un petit peu, car le virus est toujours présent », a-t-il souligné.
Et de poursuivre : « dans des régions proches des nôtres où le virus a été très bien contrôlé comme en France, et bien on voit quand même que la situation peut s'aggraver avec des clusters suffisamment importants pour passer à un confinement localisé, et cela peut tout à fait nous arriver cet été ». Il appelle à ne pas relâcher les efforts en termes de mesures préventives et à se faire dépister en cas de symptômes.
Marina Pollán abonde en ce sens : « Nous voulons être avec nos amis et nos familles, mais le virus est toujours là et nous devons agir en étant responsables de notre propre santé et de celle des autres. La population doit être consciente de la nécessité de suivre les conseils des autorités sanitaires concernant le maintien des mesures d'hygiène et d'une distance sociale sûre. »
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