Alors que des travaux établissent un lien entre le travail de nuit et les risques pour la santé et notamment la survenue de cancers, des chercheurs français et britanniques ont exploré l’intérêt d'un dispositif de télémédecine pour tenter d’identifier les profils les plus à risque.
En Europe, le travail de nuit concernerait de 15 à 30 % des travailleurs, avec des conséquences sur leur santé. Une étude de l’Inserm montre notamment que les femmes non ménopausées qui travaillent au moins trois heures entre minuit et 5 heures ont un risque accru de 26 % de cancer du sein et ce risque augmente avec la fréquence des nuits travaillées et la durée de l’emploi nocturne.
Dans une expertise collective de 2016, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) allait plus loin en concluant que le travail de nuit est un facteur de risque probable de cancer en général. Ce risque a été mis en évidence par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) qui a ajouté dès 2007 le travail posté (travail effectué par des équipes successives alternantes) à la liste des agents « probablement cancérogènes ».
Des altérations accentuées par le nombre d’années du travail de nuit
Dans l’optique d’identifier des indicateurs précoces, les équipes de l’hôpital Paul Brousse (AP-HP), de l’Inserm, de l’université Paris-Saclay et de l’université de Warwick (Grande-Bretagne) ont mesuré les rythmes circadiens de l’activité de repos et de la température corporelle de 140 infirmières ou aides-soignantes volontaires (133 femmes), dont 63 travaillaient de nuit et 77 de jour. Pendant une semaine, ces soignants ont été équipés d’un capteur thoracique connecté à une plateforme de santé digitale.
Leurs résultats, publiés en juin dans « eBioMedicine », montrent des altérations importantes des cycles circadiens chez les travailleurs de nuit. Malgré une quantité de repos médiane similaire entre les groupes, les travailleurs de nuit affichaient une qualité de repos et un rythme d'activité circadien significativement moins bons que leurs collègues de jour. Et ces altérations persistent pendant les jours de repos chez près de 20 % des personnels de nuit, est-il relevé. Elles tendent également à s’aggraver avec l’augmentation du nombre d’années de travail de nuit.
Ces éléments pourraient ainsi constituer « des signaux d'alerte précoce d'une mauvaise santé et d'un risque ultérieur de maladie potentiellement mortelle », estiment les auteurs, ajoutant que ces biomarqueurs « pourraient guider les interventions médicales et le suivi ». À l'avenir, la mesure de l’empreinte du rythme circadien et des perturbations du sommeil pourrait faire « partie intégrante de la médecine du travail de routine » et « soutenir les interventions sur l'horaire de travail d'une personne à risque », poursuivent-ils.
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