Réagissant à la proposition de loi déposée le 1er octobre dernier par Jean-David Ciot, député PS, et relative notamment à la prévention des risques pour la santé de l’exposition aux ondes électromagnétiques, l’Académie nationale de médecine met en garde contre l’utilisation abusive du principe de précaution. En effet, l’Académie « regrette une initiative fondée sur un flou scientifique et réglementaire qui, ne pouvant se prévaloir en dernier recours que du principe de précaution, est de nature à renforcer artificiellement chez nos concitoyens un sentiment de peur et de défiance injustifié, mais préjudiciable en terme de santé publique ».
Rectifier erreurs et imprécisions
Dans la perspective d’un débat parlementaire sur le sujet, l’Académie souhaite « que les arguments scientifiques ne soient pas encore une fois occultés ou déformés ». C’est pourquoi, elle tient à rappeler la position de l’institution et « à rectifier, références à l’appui, les erreurs et imprécisions contenues dans cette proposition de loi ».
L’Académie souligne, en particulier, que le classement en « possiblement cancérigène » (2B) par le Centre International de recherche sur le cancer (CIRC) « ne concerne pas les antennes relais mais les portables ». Les antennes de téléphonie mobile entraînent une exposition aux champs électromagnétiques 100 000 à 100 000 fois plus faible que les téléphones portables. « Être exposé pendant 24 heures à une antenne à 1 volt par mètre donne la même exposition de la tête que téléphoner avec un portable 30 secondes », précise l’Académie.
Par ailleurs, « on ne connaît aucun mécanisme par lequel les champs électromagnétiques dans cette gamme d’énergie et de fréquence pourraient avoir un effet négatif sur la santé », précise-t-elle dans un communiqué. L’Académie se fonde pour cela sur le rapport publié en 2009 par l’Agence française de sécurité sanitaire environnementale et au travail (AFSSET devenu ANSES). En particulier, « aucune preuve n’existe à ce jour que l’utilisation régulière de téléphone mobile augmente le développement de cellules cancéreuses ou pré-cancéreuses et n’augmente ainsi, du fait de ce mécanisme de promotion, le risque de tumeur intracrânienne », insiste le communiqué.
Le rapport de l’AFSSET concluait alors : « Au vu de l’analyse détaillée et critique des travaux effectuée par le groupe de travail et compte tenu par ailleurs de l’état antérieur des connaissances, aucune preuve convaincante d’un effet biologique particulier des radiofréquences n’est apportée pour des niveaux d’expositions non thermiques. »
Un rapport contesté
Selon les données de l’AFSSET, la proposition parlementaire d’abaisser le seuil maximal d’exposition aux ondes électromagnétiques à 0,6 volt par mètre, « n’a aucune justification scientifique ».
L’Académie rappelle que ces conclusions ont été partagées par d’autres expertises collectives comme celles de l’OMS ou de l’OPECST. L’AFSSET récusait déjà les conclusions du rapport BioInitiative de 2007 qui, soulignait l’Agence.
Dans un nouveau rapport publié il y a quelques jours, le groupe d’experts de BioInitiative a passé en revue 1 800 études pour conclure à un risque pour la santé des ondes électromagnétiques même à des doses non thermiques notamment sur le développement des cancers ou encore dans le développement de la maladie d’Alzheimer. Le nouveau rapport BioInitiative recommande lui aussi un abaissement des seuils d’exposition.
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